lundi 31 octobre 2016

Habiter : conte d'automne



Nous partageons la salle de bain depuis pas mal de temps déjà.
Habituellement, j'apprécie sa compagnie douce et apaisante.
C'est une princesse stressless, qui m'invite à prendre mon temps
(elle, elle a tout le sien) 
Forte de son expérience,
elle sait se montrer rassurante et,
s'il le faut, consolatoire. 

Mais, là, ce matin,
elle dans son cadre, moi dans mon miroir,
il a suffit d'une ridule de trop,
d'un regard de biais, 
pour que je réalise qu'elle, la belle de la Gemäldegalerie,
serait toujours épargnée par les effets de l'âge.

Et, s'il devait apparaître une ou deux craquelures sur son beau visage,
une armada de restaurateurs se presseraient à son chevet,
pour rectifier l'outrage.
Am stram Grimm! L'espace d'un instant, je me suis vue marâtre!

dimanche 30 octobre 2016

Voyager : j'avais adoré cette chambre...









... son ouverture...
l'intensité de cette lumière...
et ces semaines
...avant
après....
...la vie en-dehors de l'univers
professionnel
dissipait toutes les brumes....

samedi 29 octobre 2016

Vivre : ma saison préférée



Roulant à travers la campagne
désertée par tous les véhicules urgemment pressés,
sous le tranquille regard des vaches
(le pré est vénéneux mais joli en automne...)
dans l'étincelante lumière du matin,
j'ai levé le pied jusqu'à l'arrêt
- sans m'en apercevoir -
toute à mon plaisir d'admirer
cette flamboyante saison :
elle donnait au paysage des allures de cathédrale,
les feuillages en guise de vitraux,
et la route comme une nef infinie.


vendredi 28 octobre 2016

Vivre : faire prévision




Le renouvellement de mon ordonnance se faisait attendre.
Devant moi, les présentoirs indiquaient plus surement que les vitrines vestimentaires
la saison qui s'annonçait.
Tout était en mode "anti" :
-douleurs, - inflammatoires, - vomitifs, -tussifs.
En sirops, en tablettes, en comprimés, en gouttes, en capsules.
Il y avait là de quoi passer une bonne nuit, de quoi être performant durant la journée,
de quoi se calmer, de quoi assurer et se rassurer.
J'admirais les couleurs pimpantes des emballages, 
bien rangés par thématiques, 
qui annonçaient de manière infaillible la tendance automne-hiver.


jeudi 27 octobre 2016

Vivre : l'âme soeur



Samedi. Treize heures.
Sur la place animée, la voici attablée avec son père
pour y prendre, comme nous tous, l'apéritif.
Elle peut avoir huit, neuf ans.
Elle n'est pas jolie (ni laide d'ailleurs).
Ni coquette. Ni vraiment élégante.
Au premier regard, elle pourrait être banale,
passer inaperçue.
Mais, soudain son regard s'allume et elle sourit, 
elle bondit
dans un élan joyeux
vers un adolescent lui ressemblant trait pour trait,
encore tout pris par sa conversation avec deux amis
à la sortie des cours,
indifférent sur le moment à l'élan dont il fait l'objet, 
alors, elle illumine la terrasse de sa présence brune,
alors elle devient belle, vivante.
Elle rayonne de cet amour fraternel.

Savoir aimer au point de renaître lors des retrouvailles! 
Aimer inconditionnellement, tendrement!
Parfois, il suffit d'un rien, de presque rien
 pour que la clef des souvenirs tourne,
libère des émotions anciennes et belles.
Et douloureuses.

mercredi 26 octobre 2016

Voyager : à quel saint se vouer




J'ai reçu récemment un mailing invitant à un workshop sur le thème de :

Foutez-vous la paix !

J'avoue que je ne connaissais ni Tal Ben-Shahar, ni son cours de psychologie positive apparemment fort prisé à Harvard, ni ses bouquins. Je ne sais pas si j'irai me procurer un de ses livres pour voir de quoi il en retourne et si la publicité en vaut la chandelle. 

Non : ce qui m'a plu, c'est juste le slogan. Il me parle intensément. A force de vouloir bien faire, de se remettre en question, de lire, d'écouter, de suivre les diverses tendances, et de penser à apprendre, on risque de devenir le plus sûr martyr de soi-même. A Parme et à Pavie, entre deux musées, j'ai visité quelques librairies et fait ce constat basique : Le nombre de livres en mode conseil qu'on nous propose! Le nombre d'injonctions et de règles à suivre! Le nombre de recettes ! Au secours!

Des mètres et des mètres de recommandations, dans tous les domaines : pour être parents, pour être amants, pour être enfants; pour grandir, pour mûrir, pour vieillir; pour gérer son argent, sa carrière, sa santé; pour vivre les crises, les changements, les tournants; pour aménager sa maison, pour son alimentation, pour ses relations. Ah!

Tout à coup, prise de tournis, mais toujours les pieds sur terre, j'ai repensé au worshop et décidé de l'appliquer sur le champ : dehors, le beau soleil d'octobre m'attendait, et avec lui les terrasses animées, les cris des enfants et les roucoulements des pigeons idiots. 

mardi 25 octobre 2016

Vivre : réveils en Emilie-Romagne



Tous les matins,
à la fenêtre,
le brouillard nous accueillait.
Il montait,
il descendait,
il cachait et découvrait,
tour à tour,
 le soleil timide,
au gré des respirations d'une campagne
généreuse et lasse.
Au loin, des cris d'oiseaux,
quelques aboiements,
peut-être un train, 
quelques traces de vie...

lundi 24 octobre 2016

Vivre : paroles muettes



A l'aller, 
roulant silencieusement dans la campagne assoupie,
tandis que les nuages rosissaient doucement au crépuscule,
nous sommes passés par un village qui s'appelait Parola.

Un peu plus tard, 
nous dirigeant vers le restaurant que nous avions choisi,
pris par nos pensées 
et par cette nostalgie qui vous saisit 
quand la nuit tombe à l'automne,
un panneau nous a indiqué que nous traversions
le hameau de Paroletta, petite parole.

Cependant, dans l'habitacle,
nous continuions de ne piper mot.






dimanche 23 octobre 2016

Voyager : demi-tour




Le long de la route sinueuse, les vaches, brunes, noires, rousses, 
étaient alanguies sous les rayons de l'automne, 
telles des Paulines en attente de leur Canova, 
comme si elles profitaient de leur dernière fois. 

Et, quelques kilomètres plus haut,
preuve de leur juste intuition, 
nous avons dû rebrousser chemin :
col fermé et risques d'avalanche.

jeudi 20 octobre 2016

Vivre : se mettre dans le bain




Bon, cet automne, je me suis décidée. Moi qui déteste les piscines couvertes, leur fond sonore, leur pauvre toit en guise de ciel, leur ambiance plombante, les alignements de foehns à la sortie, les chahuts des classes, les cris et les coups de coude, j'ai pris un abonnement annuel pour les Bains.

Adorant l'eau, j'ai décidé de me faire du bien plusieurs fois par semaine et de barboter dans les bulles, de me masser aux buses, de jouer à nager à contre-courant.

Après quatre ou cinq entrées, tôt le matin, j'ai commencé à identifier le groupe des "habitués". Ceux qui s'y rendent tous les jours, à heure fixe, pour y prendre leurs eaux. Ils sont ainsi une quinzaine, d'un âge plutôt canonique, qui se retrouvent et y tiennent salon. Oui, comme au XVIIIème siècle, des dames, des messieurs, se retrouvent et papotent avec élégance, en s'entretenant sur des sujets divers, de façon fort civile. Le bassin d'eau chaude leur tient lieu de salle de bal, les buses de jardin anglais. Ils vont et viennent, tournent, esquissent des mouvements de rotation, dans une chorégraphie bien orchestrée.

Je n'entends rien à leur propos, mais je devine qu'ils doivent être passés maîtres dans l'art de la conversation. Et, ainsi le temps s'écoule, et quand je quitte les bassins, je les laisse tout à leur short talk et à leurs élégantes circonvolutions.


mercredi 19 octobre 2016

Lire : expédition risquée



"El amor es la expedición mas arriesgada que existe"
dixit Ben Clark, jeune poète vivant à Ibiza.
Comment le contredire ?


ENVÍDIAME, YO PUEDO AMARTE AÚN

Cuando ya no es posible cuando ya
y ya no y es que todo es demasiado
yo puedo amarte aún.

Cuando tú y cuando entonces y después
y me dijiste y puede que si hubiéramos
yo puedo amarte aún.

Cuando ella y cuando él y las llamadas
y las veces que no te respondía,
cuando acaso y en éste mismo instante;
no después sino ahora y no hace falta
decírtelo de nuevo pero sí:
yo te amo por encima de nosotros.

tiré de "Los últimos perros de Shackelton"  Ed. Sloper, 2016



mardi 18 octobre 2016

Vivre : let it be / 6




Il a 27 ans. Il aime bien boire et bien manger. Et comme il vient de réussir ses derniers examens (durs durs examens), on a décidé de lui offrir une virée gastronomique avec visite de cave à la clef.

Il apprécie le vin de la maison G*** au Piémont. Qu'à cela ne tienne : j'envoie un mail à ladite maison pour leur demander s'ils sont ouverts le week-end et s'ils vendent également sur place des bouteilles de leurs vignobles toscans.

Je reçois la réponse sous forme d'une longue tirade dans un italien ampoulé. Non, ils n'ouvrent pas les fins de semaine, et pas les jours fériés. Non, ils ne vendent pas leur vin sur place : il faut s'adresser pour cela aux meilleures œnothèques (y compris pour leurs vins toscans dont ils précisent les appellations exactes). Non, ils craignent de ne pas pouvoir faire visiter leur cave en raison de la forte demande actuelle. Ils craignent que l'attente ne soit d'un mois en ce moment. Et, tout bien regardé, ils craignent également que ce ne soit complet durant le prochain trimestre.

Euh, est-ce qu'ils ne craindraient pas aussi d'attraper la grosse tête ? Leur snobisme ridicule serait-il une touche de marketing supplémentaire pour faire monter des prix déjà délirants ? Dans tous les cas, ils m'ont fait penser à l'artiste Piero Manzoni ... rien de nouveau sous le soleil depuis 1961....

dimanche 16 octobre 2016

Vivre : parcours du combattant


Florence, piazza della Signoria

Elle est belle. Très. Originale, avec une ligne épurée. Habillée de rouge.
Pas le genre qui se voit à chaque coin de rue.
Une déesse.
Ce qu'on lui reproche : son âge. 
Trop de rides au coin des phares.
Il paraît qu'elle fait has been
qu'elle n'est pas assez sophistiquée, au goût du jour, 
qu'il faut la mettre au rebut
(elle! pas une once de rouille!
foutue société de consommation!)

Alors, on s'est mis en piste.
On a trouvé le garagiste qui la préparera pour l'examen.
On a déniché des pièces loin très loin . 
On a trouvé le pot aux normes.

Mais hier, quand j'ai ouvert le colis arrivé d'Allemagne
et que j'en ai sorti un moche bout de plastique tout fissuré
facturé 60 euros
j'ai senti les bras m'en tomber. 

Ce matin j'avais la rage. 
contre ce monde kleenex et je rêvais d'une décharge
pour tous les margoulins de bas étage. 








vendredi 14 octobre 2016

Vivre : coup de massue



L'été
semblait si proche
hier encore
les sandalettes
la protection 50+
et voici
que l'hiver s'est imposé
et avec lui
l'obligation de fermer rapidement portes et fenêtres,
le recours à des plats roboratifs,
et surtout
tous ces gens qui se retirent
pour garder leurs microbes.


jeudi 13 octobre 2016

Vivre : l'appel du large





C'est chaque année pareil.

Quand octobre montre ses couleurs éclatantes, disperse dans le village des odeurs de flambées et exige de nouvelles couches vestimentaires, je ressens l'appel de Venise.

Tout me ramène à cet automne 1998, quand j'étais partie là-bas pour erasmer avec plus ou moins de bonheur. Malgré la solitude, je me souviens avec nostalgie de ces journées ensoleillées.

Dans mon souvenir, il n'y a eu cet automne-là que trois ou quatre matinées de pluie (dont une associée à l'acqua alta, qui avait entraîné de par la ville des détours invraisemblables et passablement perturbé le déroulement des cours). Je me souviens que bien vite, la pluie se dissipait et laissait place à un merveilleux ciel bleu tendre. Le jour, je vivais de longs lézardages sur les terrasses. La nuit, je retrouvais ma solitude glacée (dans de sombres bibliothèques qui restaient ouvertes jusqu'à 22 heures, dans mon petit appartement mal isolé).

Et, depuis, immanquablement, en cette période de l'année, je ressens l'appel impératif de la lagune.

mercredi 12 octobre 2016

Vivre : N-I-NI, c'est enfin fini!




Je suis tombée hier sur une émission de Xenius sur Arte, qui traitait du bore out. Le bore out, comme le burn out, est une pathologie liée à l'univers professionnel et qui présente les mêmes symptômes (dépression, insomnie, perte d'estime de soi). Cependant, alors que le burn out est lié à un excès d'exigences et de pressions sur la durée, le bore out provient d'un manque de stimulations.

Pour parler bref : c'est l'ennui au travail, la contrainte du présentéisme, le manque de sollicitations.

Zoé Shepard (nom d'emprunt d'Alice Boullet) a écrit en 2012 un livre sur le sujet, qui rend compte de son expérience au conseil régional d’Aquitaine. Sous le titre "Absolument dé-bor-dée", elle dénonce tous les dysfonctionnements de l'administration qui l'ont conduite à ne travailler que...trois heures par semaines et à en tomber progressivement malade. Elle y raconte par le menu tous les rouages du système. Le fait que le livre, très bien documenté, se soit vendu à 70'000 exemplaires montre bien combien le sujet est sensible, touche une multitude de gens, même s'il reste encore tabou d'en parler et encore plus de le dénoncer.

Trahie par un ancien camarde, Alice Boullet a dû payer le prix fort pour son "incartade". "Ta carrière est fi-nie", son deuxième ouvrage, rend compte de la placardisation dont elle a fait les frais ensuite.
« Être au placard, c'est comme avoir la grippe porcine : vous devenez le sujet de toutes les conversations, mais tous les collègues vous évitent par peur de la contagion ! »
J'écoutais avec intérêt cette émission, évidemment. Soulagée de voir que le phénomène est reconnu et que les mesures pour aider les personnes qui en sont victimes se développent.

J'écoutais aussi avec en tête des images et des souvenirs restés vifs. Burn out, bore out, placardisation... Au fond, quel gâchis d'énergies! C'est fou comme la peur, de l'Autre et de soi, la peur de la différence et de la nouveauté, la peur du changement peuvent grignoter les élans et les enthousiasmes! Heureusement, il nous reste l'amour, la poésie, l'art (sous toutes ses formes), la mer, les îles, et tous les matins du monde!

mardi 11 octobre 2016

Habiter : coloriages



Il y a désormais huit ans que nous habitons cette maison. Au début, je tenais absolument à sa sobriété. Je voulais peu de meubles, aucun tableau aux murs, rien que de la lumière et de l'espace.

Force est de constater que ça n'a pas marché comme prévu. Il y a de plus en plus de bibelots, de couleurs, d'enjolivures un peu partout. Et cela, malgré moi.

Là, cette guirlande de piments pimpants rapportée de Croatie. Ici, le petit carrousel acheté au Musée Tinguely. Des pots de sauces italiennes rouge pétant, des bols en reiki orange. Et samedi, le pompon, si j'ose dire : voulant orner les rideaux en lin blanc de ma salle de bain, en cachant leurs anneaux disgracieux, j'ai prospecté dans plusieurs boutiques bernoises pour finir par dénicher de sympathiques porte-clefs indiens. Je suis donc saluée tous les matins, tous les soirs par des éléphants joyeux et colorés, qui me toisent et se moquent pas mal de mes principes et de la simplicité heureuse.



dimanche 9 octobre 2016

Vivre : mode d'emploi


Pietro Longhi, La vita nova

Depuis combien de temps est-ce que je m'habille en ignorant la mode ? Des années, je crois.
C'est venu insensiblement, le besoin de confort ayant peu à peu pris le pas sur les diktats en tous genre. J'aime me sentir à l'aise dans mes vêtements (que je choisis en fonction de leur praticité non seulement d'usage mais aussi de nettoyage: ils doivent tous pouvoir passer au lave-linge à 30° et dans la mesure du possible se passer de repassage).

Mon style est simple, le moins coloré possible : essentiellement du blanc, du noir, du bleu délavé. Des textures souples, des matériaux nobles, de la qualité, de la laine, du coton, du lin, du viscose. J'aime les lignes épurées, les modèles originaux, et je n'hésite pas dépenser pour une pièce dont je sais qu'elle durera des années. En faisant du rangement, j'ai passé en revue des tuniques achetées il y a au moins dix ans. Elles sont toujours impeccables et plaisantes à porter.

Ignorer la mode ne signifie pas ne pas acheter des vêtements présentés dans les vitrines. ça signifie juste acheter ce qui plait, ce qui plaira et qui plaira encore. Je prends donc dans la tendance du moment ce qu'elle me propose en rapport à mes goûts et besoins (les pantalons stretch 3/4 si pratiques sous des tuniques, les sandalettes plates genre Tropéziennes, les Chelsea boots). Le reste, je le laisse volontiers aux fashionistas.

Du reste, ignorer les nouveautés revient très bon marché. Le plus souvent, j'achète en soldes, à 50% ou 70% des pullovers qui ressemblent comme deux gouttes d'eau à ceux qui sont étiquetés "nouvel arrivage" deux mètres plus loin. Même coupe, même composition, juste d'un ton un peu plus soutenu, juste un peu plus échancrés.

En outre, depuis que je vis à la campagne, mon style urbain ethnico-chic a viré nettement au pratico-sportif. Ici, les occasions de "s'habiller" sont rares et aller faire ses courses bien sapée, ça détonne passablement. Donc, je vais au plus fonctionnel :un jean, un haut à la coupe originale, une paire de baskets ou des bottines, peu de bijoux : mes deux trois bagues fétiches, des boucles d'oreilles, un bracelet.

Restent les accessoires, mon péché mignon. Mes armoires abritent une belle collection de sacs classieux italiens, de foulards aux couleurs chatoyantes (avec une nette préférence pour les marques danoises ou la marque Epice). Ce sont mes intemporels.

Et c'est en étant dé-modée, décalée, que je me sens vraiment libre d'être qui je suis.



samedi 8 octobre 2016

Voir : quand la mer est en feu


(rien à voir : photo prise depuis chez moi)

Fuocoammare est le titre d'une chanson sicilienne des années quarante (qu'on n'entend du reste pas dans le film documentaire de Gianfranco Rosi). Il signifie : feu sur la mer. Durant près de deux heures, le cinéaste nous emmène à Lampedusa pour nous montrer le quotidien de ses habitants.

Nous suivons les pas d'un jeune ragazzo d'une douzaine d'années, Samuele, son père, sa grand-mère. Nous voyons comment se déroule la vie de ces insulaires au jour le jour : la pêche, l'arrêt forcé les jours de tempête, les repas en famille, la réfection du lit au matin, les chansons demandées à la radio locale, grâce auxquelles ces gens taiseux se disent leurs sentiments. Samuele se fabrique une fronde pour attraper les oiseaux, il a le mal de mer et doit soigner un œil paresseux. Vif et curieux, il souffre de tourments cachés aussi, parle de son anxiété avec le médecin de l'île.

Ce médecin, qui évoque en quelques phrases de son travail lourd et terrible, fait le trait d'union avec le monde des migrants, autre versant du documentaire. C'est lui qui est présent lorsqu'on accueille les échoués, lui qui effectue les premiers examens et qui oriente vers l'hôpital. Lui à qui revient la lourde tâche de faire office de médecin légiste. Cependant, on le voit aussi heureux de procéder à l'échographie d'une jeune femme dont la grossesse a miraculeusement survécu à la traversée.

D'un côté, donc, les habitants de l'île, menant une existence simple, laborieuse. De l'autre, les équipes de sauvetage suivies dans leur travail, étape par étape. Les images sont belles, sobres. Il n'y a aucun commentaire, pas de voix off. Au moment du générique, on se demande si et quand ces deux mondes se rejoignent.

Je suis sortie de la salle émue et éblouie, triste et interrogative, car la question est vraiment celle-ci, pour nous tous : quand est-ce que notre monde et le monde des migrants se rejoignent-ils ?

vendredi 7 octobre 2016

Lire : zigs-zags temporels



ICI est une BD particulière.
Elle balaie le temps, depuis l'ère glaciaire jusqu' à nos jours pour parler d'un lieu,
décrivant ce qui s'y est déroulé.
Sur la même page, des scènes d'époques très distantes sont mises en scène.
C'est bref, un dialogue, un paysage, une saison.
Le lecteur va et vient.
Se retrouve dérouté.
Car la simplicité du dessin et des situation est trompeuse. 
On est entraîné en avant en arrière dans la temporalité.
Et on réalise qu'il faudra sans doute relire plusieurs fois
cette oeuvre (primée à Angoulême)
pour vraiment réussir à reconstituer le puzzle.
ça m'a donné l'envie d'en savoir plus sur 
Richard MacGuire,
un artiste à l'oeuvre protéiforme. 


jeudi 6 octobre 2016

Habiter : little Bouddha



Il m'a offert un minuscule jardin zen
à l'entrée de la maison.
L'idée d'un Bouddha bienveillant et discret
s'est imposée.

Alors, j'ai cherché à m'en procurer un. 

Mais... rien. Dans les magasins, rien.
Moi qui avait trouvé mièvre la tendance déco des bouddhas,
trouvant qu'il y en avait trop, partout, 
de toutes tailles et de toutes couleurs,
je me suis retrouvée bredouille :
il semblerait que la mode à présent soit aux nains de jardin.

Zut, alors!

Finalement, c'est chez Maxibazar (un magasin totalement inconnu)
que j'ai déniché le petit Bouddha
qui veille désormais devant la porte.


mercredi 5 octobre 2016

Vivre : à l'ouest, que du nouveau



Garder intacte
la capacité de s'étonner.
Porter un regard de débutant.
Ne jamais perdre de vue
les merveilles de la banalité.

mardi 4 octobre 2016

Vivre : la bonne formule


Dans les ruelles aux pavés étincelants, les boutiques pullulaient.
Le regard cherchait désespérément quelque chose de simple, de beau, d'apaisant.
La dernière mode, en matière de souvenirs,
 c'étaient les carrelages avec des textes du style :
"Une journée sans avoir ri est une journée perdue"
"Keep calm and make shopping"
"Il est plus facile d'être fidèle à un restaurant qu'à une femme"

Et puis un jour, j'ai découvert celle-ci:

"Be a good person, but don't waste time trying to prove it".


lundi 3 octobre 2016

Voyager : trop de trop


L'argent n'est pas tout, mais malheureusement bien plus que ça.


Non, malgré la beauté palladienne de la ville,
sa photogénie certaine,
malgré ce restaurant aux saveurs exceptionnelles,
malgré la lumière d'automne
et l'originalité certaine de notre hôtel,
nous n'avons eu qu'une envie,
très vite :
quitter la ville.
Trop triste, trop calme
trop délabrée par endroits,
trop proche d'une base américaine.
Nous avons poussé un soupir de soulagement en quittant
ses rues aux accents US et
ses places aux rares enfants trop sages. 

dimanche 2 octobre 2016

Vivre : la possibilité d'une île



D'étape en étape,
ce n'était jamais vraiment ça.
On cherchait.
On cherchait toujours.
Malgré toutes les merveilles culturelles
on cherchait notre coin idéal.

Alors,
quand on a amorcé la descente
vers le petit port
et qu'on a vu le ferry sur le point de partir
comme en attente
comme s'il ne manquait que nous
(effectivement nous étions les derniers)
nous avons compris que nous l'avions enfin trouvée,
notre île.

Et au loin, la voir.
Et dans le cœur, dans le corps,
ressentir toute la solennité 
de ce moment. 

samedi 1 octobre 2016

Voyager : loubards des îles



Ils zonaient toujours devant l'entrée.
Leur chef de bande,
un  beau blond costaud,
répondait au nom de Giuseppe.
C'était un mâle classieux,
reconnu,
estimé,
le dessus du panier.