lundi 13 janvier 2025

Voyager : et admirez Venise et la vie et la mort et votre cœur intense

 
Inge Morath / Campo dei Mori / 1951 / Venezia
 
 
petits chenapans ou bonne sœur
en noir et blanc ou en couleurs
sombres calli voilées de mystère
présences de lions ou de Maures
par temps clair ou par brouillard
le temps est enfin venu du départ
 
Le titre est tiré d'une des "Lettres à une amie vénitienne", de R.M. Rilke, éd. de l'Herne, 2016

dimanche 12 janvier 2025

Vivre : la bonne occase

 
 
The Walthamstow Tapestry / Grayson Perry / 2009 / Arken Museum / DK
 
Le ciel était chargé de neige. La tôle rouge grenat. La poignée échangée ferme. "Totale confiance" me susurrait quelque chose au fond de mon sternum. J'ai su que c'était elle et que ce serait elle pour pas mal de temps. Elle, pour toutes les itinéraires familiers et pour toutes les destinations à inventer.

samedi 11 janvier 2025

Vivre : ce qui vit dans l'hiver

 
 
 
Parmi toutes les choses qui existent et qu'on ne voit pas : le calme des lieux. Premières semaines de janvier. Certains sont partis sur les hauteurs s'adonner aux joies de la glisse. Les chantiers sont encore en vacances. Les gens ont repoussé leurs réparations, réduit leurs obligations. On ne perçoit nulle urgence. Une paix à couper au couteau envahit les terres. On se croirait au milieu de nulle part. D'imperceptibles flocons s'aventurent sur les truffes et sur les cils. L'harmonie s'impose en ces moments de creux, où le vide devient un trésor, où l'on surprend un oiseau en train de pépier son bonheur. Devant une graine, peut-être. Ou pressentant l'envol invisible d'un congénère.


vendredi 10 janvier 2025

Vivre : en piste!

 
The Love Letter (detail) / J. Vermeer / Rijksmuseum / Amsterdam
 
 
Depuis toujours, la rentrée de janvier est un moment critique : la nuit, la reprise, la pluie et encore la nuit. Sans compter les visages pâles et déprimés de ceux qui réalisent qu'après les Fêtes les contrariétés sont loin d'être terminées. Hier notre voisine K. a su à peine esquisser un sourire devant les deux bouteilles que je lui tendais. "C'est dur, la famille, les fêtes..." Oh! oui : il y a des chances pour que ce soit dur. Raison de plus pour ne pas se laisser emporter. Remiser le passé. Se centrer sur le présent. Faire une place à l'avenir. Envisager diverses options : des projets, des défis, des obligations, que la déprime comprenne qu'on lui fera front. A peine la vision 2025 confiée à son cahier, la January Cure vient de s'annoncer. 
 
Chaque jour ouvrable, pendant trois semaines, un devoir à accomplir pour remettre l'habitat à flot question ordre et limpidité. Ce qui est impressionnant, c'est que même si je la suis depuis plusieurs années et que tout au long des mois suivants je m'astreins à certaines règles d'entretien et de sobriété, je me retrouve  immanquablement devant des espaces à élaguer, des objets à nettoyer ou à donner. 
 
Les exercices ne prennent pas beaucoup de temps. Cette semaine, vingt minutes quotidiennes ont suffi à remplir deux sacs pour la table à échanges de la déchetterie. A force de se dire : "pour le cas où" on finit par comprendre que le dit cas n'arrivera jamais. En revanche, le mixer, ou les six tasses à café superflues, ou la cinquième plaque à tarte continuent de contrarier nos désirs de fluidité. Les meilleurs critères à appliquer : considérer les choses selon leur réelle utilité et le plaisir que l'on éprouve à les manier. 
 
La cuisine a été revisitée. Les gestes semblent plus évidents, l'espace apparaît plus grand (même si ce sont les placards et les tiroirs qui ont été allégés). L'accumulation est une agression contre nos sens, un défi au bon sens. Bien bien bien... maintenant, ne reste plus qu'à se diriger vers les salles de bain et les penderies... une chance que la météo annonce encore quelques jours d'intempéries...

jeudi 9 janvier 2025

Lire : relire, relire et encore relire

 


Vous êtes si jeune, en quelque sorte avant tout commencement, et je voudrais, aussi bien que je le puis, vous prier, cher Monsieur, d'être patient à l'égard de tout ce qui dans votre cœur est encore irrésolu, et de tenter d'aimer les questions elles-mêmes comme des pièces closes et comme des livres écrits dans une langue fort étrangère. Ne cherchez pas pour l'instant des réponses qui ne sauraient vous être données car vous ne seriez pas en mesure de les vivre. Or, il s'agit précisément de tout vivre. Vivez maintenant les questions. Peut-être en viendrez-vous à vivre peu à peu, sans vous en rendre compte, un jour lointain, l'entrée dans la réponse.
Lettre du 16 juillet 1903
 
à toute heure du jour, quelle que soit la saison,
et les forêts traversées, les bourgeons, les buissons,
comment, mais comment pouvoir se passer de Rilke ? 

 

mercredi 8 janvier 2025

Vivre : qui l'a vu?

 

le premier arc-en-ciel de l'année: s'est montré, a disparu, est revenu, 
lutin, mutin, coquin, joueur assoiffé, trois petits tours et s'en est allé

mardi 7 janvier 2025

Vivre : les petits pas

 
La cueillette des pois / Camille Pisarro / Musée Langmatt / Baden
 
Ces derniers jours, il tourmente à l'extérieur et ça travaille à l'intérieur. Après avoir écrit une carte d'adieu à l'année 2024, me voici dans le petit bureau rouge, face à un grand cahier, en train de découper, coller, inventer, dessiner la vision de la nouvelle année
 
Comment dire ? Je ne crois pas beaucoup aux prétendues bonnes résolutions. Je ne crois pas davantage aux virages brusques, et encore moins aux formidables améliorations. Je croirais plutôt aux avancées confiantes, aux recherches éclairantes, aux paroles qui surgissent, aux traits qui s'esquissent et finissent par fournir des réponses pertinentes. Ne pas forcément attendre beaucoup, mais être ouverte à l'inattendu. Je crois aussi au pouvoir des moments entre deux (le passage d'une année à une autre, les journées amorçant la rentrée de septembre), toutes ces transitions où l'on n'est pas encore sous l'emprise des routines ou des obligations. L'instant de vide entre deux respirations. 

Dans tout ce processus qui prendra plusieurs heures, étalées sur quelques jours, l'exercice des "petits pas" est mon préféré : définir divers objectifs, raisonnables ou pas (laisser la vie en juger), quelques empreintes de pieds dessinées d'un bout à l'autre de la page en guise d'étapes visualisées. En quelques mots, quelques symboles, quelques couleurs, définir les résultats visés, les moyens pour s'en approcher.

Souvent, une phrase peut sauver. Une idée illuminer. Une image faire évoluer. Sans tout bazarder. Sans juger, ni gommer. Juste : évoluer. Vers plus de compréhension, plus de simplification, plus d'assurance. Vers des réalisations qui font sens.
 
En revanche, question accomplissement, la section d'une année se révèle arbitraire. En plongeant dans mes vieux cahiers, je remarque que j'ai atteint l'année dernière des objectifs posés il y a trois ou quatre ans. Le truc - si truc il devait y avoir - c'est de se donner le temps, éparpiller ses espérances et laisser les choses peu à peu se faire, observer ce qui vient avec curiosité comme on regarderait une plante germer.