mercredi 12 juillet 2017

Ecouter : Fred cavalant derrière ses personnages




Il y a des écrivains comme ça : on aime les lire. 
On aime presque autant (et certaines fois presque plus) les écouter.

Quelques citations de Fred, à mon heure préférée:
 :

"C’est pas l’intrigue qui vient, c’est un objet volant non identifié, parmi toutes les idées qui défilent, qui défilent, qui défilent, et puis il y a une idée qui ne veut pas partir, un truc improbable, et au bout de deux mois, je suis obligée de capituler, de faire un livre autour d’elle, parce qu’elle bouche la route aux autres. Je construis vaguement une intrigue, je suis obligée de trouver un mobile. Et un mobile de meurtre, pour moi, c’est ce qui est de plus douloureux à trouver et à concevoir.Enfin, c’est le jeu, là. Je ne peux pas jouer avec la musique des mots si je n’ai pas d’histoire."
 "J’ai déjà fait la tentative d’un plan de livre : dès le premier chapitre, je le suis pas, donc j’ai abandonné ce fait."
"Je suis pas cinglée, je suis pas dédoublée, je rassure, mais il y a comme un film en noir/blanc de l’histoire qui se déroule dans ma tête à peu près un quart de seconde avant que j’aie décidé d’écrire. Ce qui fait que je suis obligée de les suivre, de leur cavaler après, les personnages. Tout à coup il [Adamsberg] rencontre quelqu’un et je suis obligée d’attendre que le film me montre qui est ce quelqu’un. Je suis précédée par l’histoire qui cavale, des fois atrocement traînée par les mots."
"Donc je présuppose qu’il y a une petite part de l’inconscient qui travaille un tout petit peu plus vite que moi au moment où j’ai les doigts sur le clavier.Des fois, je ne suis pas folle, hein, je gueule sur mon ordi, je leur dis : mais vous pourriez me prévenir quand même. Je ne demande pas la lune. Prévenez-moi avant de ce que vous allez faire ! Et puis il y a des moments où je maîtrise totalement la scène. Mais bizarrement ce ne sont pas les meilleures scènes, celles que je maîtrise totalement de A à Z. Si elles ne m’échappent pas un moment, ne serait-ce qu’un peu, elles n’ont pas le même goût."  
 "Au fond, je ne fais que recopier le film qui passe devant mes yeux. Mais je ne travaille le son qu'après. Après que j’aie cavalé derrière les personnages comme une malade.Il s’agit musicalement de prendre le lecteur là où il en est, par exemple, là sur une rive et de l’emmener doucement en bateau par la musique et quand on le redépose à la fin du livre, en réalité il faudrait que le paysage ait un tout petit peu changé, ne serait-ce que le temps de quelques heures dans sa tête." 

A la fin, Laure Adler lui dit : Mais, vous ressemblez à une femme amoureuse... Réponse :

"Je suis amoureuse des résolutions, je suis amoureuse des autres, je suis amoureuse de tous ceux que j’aime. Je ne suis pas amoureuse fixée, fixée, je veux dire monolithique. Je déteste l’humanité pour tout ce qu’elle fait, mais j’aime les gens."

Fred Vargas / L’Heure bleue / France inter / 16 mai 2017

2 commentaires:

  1. Il faudra que je me décide à ne pas mourir idiote et à en lire un...
    ¸¸.•*¨*• ☆

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  2. Pourquoi se forcer ? Pourquoi mourir? Pourquoi idiote? Pourquoi lire? alors qu'il est si facile de réécouter, en touillant la ratatouille, en conduisant, en se reposant au jardin? Sans rigoler, j'ai appris pendant cette interview que FV s'est énormément investie dans la défense de Cesare Battisti (à en avoir de sérieux problèmes avec la police) et elle donnait l'impression de préférer parler de son sens de la justice plutôt que de promouvoir son livre ...belle journée, Célestine!

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