dimanche 7 juin 2020

Vivre / voyager : des journées comme ça



Étrange journée, électrique, monochromatique, secouant les immenses peupliers pour leur extorquer dieu sait quels inavouables secrets, durcissant les regards dans les villes traversées, mines défaites et migraines qui menacent, invocations à la surface de nos âmes tourneboulées. Malgré toutes ces déstabilisations, pouvoir régler quelques affaires depuis trop longtemps emberlificotées, dénicher une chambre désuète au cœur de collines divines cajolant la Méditerranée, expédier un doux compagnon à la jolie Mademoiselle Émilie, sentir très fort des envies d'ailleurs et finir par m'écrouler, épuisée, sur mon lit en compagnie de Tiziano Terzani sur les traces des devins de l'Asie.
Ce livre a près de trente ans, mais se relit toujours avec la passion de la découverte. L'auteur, à qui un mage a prédit quelques années plus tôt qu'il risquait de périr en 1993 s'il voyageait en avion, se prend au jeu. Basé à Bangkok, il décide d'effectuer son métier de correspondant du journal allemand Der Spiegel uniquement par voie terrestre ou maritime. Terzani, grand reporter, infatigable voyageur, fin connaisseur de la géopolitique asiatique et écrivain visionnaire, a fait d'une banale prédiction non seulement le projet d'une année, mais aussi le thème d'un livre à la fois documenté et personnel. Un mélange de rationalité et de surnaturel, puisqu'en parallèle de ses investigations journalistiques, il se montre curieux de consulter des voyants à chaque fois que l'occasion se présente. Une suite de prédictions (très dissemblables, on s'en doute) mais surtout une recherche sur le sens de la vie et le sens de l'histoire, dans une fin du XXe siècle en pleine transformation, tournée vers la mondialisation.
Ce que Terzani disait hier se révèle encore d'actualité aujourd'hui, et plus que jamais. On ne peut qu'inviter à le lire (plusieurs de ses ouvrages sont traduits en français), car lire Terzani, c'est le suivre, c'est voyager à ses côtés, c'est s'enrichir de ses réflexions et de ses expériences. C'est aussi s'interroger, apprendre à observer, désirer comprendre. Relire Terzani, c'est ne jamais se sentir confinée, pas plus dans un lieu que dans une pensée et c'est achever une étrange journée en beauté.

Un indovino mi disse, Longanesi, 1995
Un devin m'a dit : voyages en Asie, Intervalles, 2015 (dernière édition française)

4 commentaires:

  1. Beauté
    d'un ciel gris
    derrière lequel se cache la lumière

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  2. Oui, en fait, on a tendance à oublier que la lumière est TOUJOURS derrière !

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  3. Bonjour Dad.
    Cette photo est absolument magnifique, j'adore !
    Quant au livre dont tu parles, je ne connais pas. Je note donc dans ma liste de livres à découvrir (sourire).
    Belle fin de journée à toi. Je continue ma lecture...

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    1. Pour la photo : le ciel est généreux ici, il prend la pose et s'offre sans discontinuer.
      Pour le livre : cette météo généreuse, elle aussi, en averses nous octroie de bons moments de lecture bien à l'abri. Profitons-en!

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