Granet aurait pu faire sienne cette sensation de Plossu :" La beauté de certains paysages rend humble, calmement heureux".
(Introduction à Italia discreta)
Parfois, ce besoin de retour : rejoindre certaines images, comme on retrouve certaines personnes. Arriver dans les salles en enfilade le souffle court, comme à un rendez-vous galant, éprouver l'impulsion d'une première fois. Parcourir avec des yeux luisants les portraits de lieux où l'on a été heureux. A l'évocation de ces
musiques et de ces atmosphères, sentir tambouriner son cœur et rester de longues minutes là, immobile, à contempler, à se rappeler.
Pourquoi, visitant certaines expositions, ressent-on une déferlante irrépressible au fond de soi ? Pourquoi s'attendrir devant ce qui pourrait relever d'une apparente banalité ? Jeter furtivement un regard à la jeune femme à l'entrée qui paraît veiller autant sur les œuvres que sur les visiteurs : que pourrait-elle comprendre si soudainement une inconnue se mettait à sangloter devant un titre, un lavis, une esquisse? Sourirait-elle ? Tendrait-elle un mouchoir ? Chuchoterait-elle que d'autres personnes, auparavant, avaient été elles aussi prises d'une intense émotion en découvrant ces œuvres exposées ?
Ravaler son émoi. Éprouver une douce tristesse. Se dire qu'un jour on comprendrait les mouvements de ce cœur emballé. Se donner le droit de ne pas encore savoir ce qu'il cherche à divulguer. Bercer ses sentiments comme on prend soin d'un jeune enfant. Regagner rassérénée la place inondée de soleil, l'infatigable été et les ramages dansants.
Images : Spilimbergo, 2008, tirage procédé Fresson // Lucca, 2009 // Padoue, 2009 // Bernard Plossu
Intérieur d'une cour à Tivoli // Vue des fabriques près de la Madonna del Ponte à Tivoli // François-Marius Granet
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire