65-S-9- 80x 74 / Martin Barré / fondation Gandur pour l'Art / Genève
L'autre jour, invité à GBVF pour parler de son livre La vie simple dans lequel il vante l'importance des vertus ordinaires pour notre équilibre personnel et social, Carlo Ossola s'est exprimé à propos de la lenteur :
La lenteur ne nous exclut pas du tout de notre temps. Si nous analysons honnêtement l'accélération des procédures que nous avons aujourd'hui, le temps gagné n'est pas octroyé au repos, pour augmenter la lenteur, mais il est concédé au contrôle, c'est-à-dire qu'il faut accélérer pour mieux être contrôlé. Et l'on se voit doublement dépossédé : d'abord, en ce qui concerne le rythme de l'animal "fait pour la paix" et d'autre part parce que l'accélération ne comporte pas une plus grande paix ultérieure, mais un meilleur contrôle. Le temps gagné ne nous appartient pas. Il s'agit d'exercer une lenteur pondérée pour éviter d'être des machines sous contrôle et incontrôlées.
Partout, aux caisses comme sur les routes, la pression d'aller vite nous happe. La plupart du temps à notre insu. Même quand on pense que la technologie vient à notre secours (en nous indiquant le temps estimé pour lire un article, ou le nombre de minutes d'attente pour l'arrivée de notre bus, ou la quantité de secondes qui nous séparent d'un feu vert quand nous sommes arrêtés pour travaux sur la chaussée), la notion du temps, du temps utilisé, du temps perdu, du temps comptabilisé est sans cesse (et de plus en plus) présente.
Du coup, pouvoir faire fi des attentes potentielles et savoir "perdre" son temps devient une véritable compétence et un luxe inestimable. A savourer sans modération.
Édition originale : Trattato delle piccole virtù : breviario di civiltà, Marsili editore, 2022.
Édition française : La vie simple. Les vertus minimes et communes, Les Belles Lettre, 2023
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire