mercredi 11 octobre 2017

Habiter : l'ennui, l'enfance et le grenier





Par un coup de chance, qui me paraît plutôt un coup du sort, il me faudra aller bientôt présenter mon travail sur l’habitat devant un public universitaire. Etant nettement plus embarrassée devant les groupes que sensible aux signes de récompense, je commence déjà à subir les piqûres de l’angoisse dans mon petit cœur (lequel apprécie très modérément ce genre d'exercice). Je vais et je viens dans la maison, je vis des hauts et des bas, j'ai envie de faire ma valise et de partir sans laisser d'adresse, me faire oublier, loin très loin. Heureusement, je me suis remise à lire Bachelard :
       Quel privilège de profondeur il y a dans les rêves de l’enfant ! Heureux l’enfant qui a possédé, vraiment possédé, ses solitudes ! Il est bon, il est sain qu’un enfant ait ses heures d’ennui, qu’il connaisse la dialectique du jeu exagéré et des ennuis sans cause, de l’ennui pur. Dans ses Mémoires, Alexandre Dumas dit qu’il était un enfant ennuyé, ennuyé jusqu’aux larmes. Quand sa mère le trouvait ainsi, pleurant d’ennui, elle lui disait : 
           - Et pourquoi Dumas pleure-t-il ?
       - Dumas pleure, parce que Dumas a des larmes, répondait l’enfant de six ans. 
       C’est là sans doute une anecdote comme on en raconte dans des Mémoires. Mais comme elle marque bien l’ennui absolu, l’ennui qui n’est pas le corrélatif d’un manque de camarades de jeux ! N’est-il pas des enfants qui quittent le jeu pour aller s’ennuyer dans un coin du grenier. Grenier de mes ennuis, que de fois je t’ai regretté quand la vie multiple me faisait perdre le germe de toute liberté. 
Gaston Bachelard, La poétique de l’espace, PUF, p. 34

2 commentaires:

  1. C'est une très bonne et saine occupation, l'ennui ! :-)

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  2. L'ennui est là pour laisser parfois se reposer l'esprit. Un peu d'ennui, à petites doses. Et puis tout repart. Quel travail sur l'habitat? Ai-je zappé un épisode? Bises alpines.

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