Conversation sacrée (détail ange) / Domenico Ghirlandaio et son atelier / Museo di San Matteo / Pisa
Elle a dit : "L'indécence d'être heureux" et ça m'a fait tiquer. Quelle indécence à l'être ? en quoi cela pouvait-il la choquer ? Elle a précisé : "Pas l'être, mais le montrer". Comme si le bonheur était une maladie honteuse qu'il s'agissait de cacher. "Le montrer, quand tant de gens sont malheureux..."
La question n'était-elle pas plutôt d'exhiber ? Afficher son bonheur, tout comme étaler ses problèmes, ne relevaient-ils pas d'un même mouvement : celui de vouloir faire pression sur l'autre, d'avoir prise sur lui, par la recherche d'envie ou d'apitoiement ?
La différence est de taille entre exhiber et être. Être ce que l'on est, être dans toute son authenticité, ne peut relever d'aucune indécence. Et si indélicatesse il y a, c'est sans doute et seulement dans le regard porté sur ce qui se présente devant soi.
Quelle indécence ? Dans certaines régions protestantes notamment, marquées par le calvinisme, il est de bon ton de ne pas montrer sa richesse, de ne pas exhiber son bien-être matériel, il faut se montrer humble. Mais de là à affirmer « pour vivre heureux vivons caché », il y un pas difficile à franchir. Est-il si indécent, si inadéquat de montrer sa joie (cela ne se fait pas voyons...), son bonheur et de vouloir le partager ? Quelle morale l’interdit ? Ou est-il inopportun d’être heureux alors que les guerres, famines et assassinats font rage ? Faut-il s’aimer en cachette par temps de guerre ? Je crois qu’il y a une différence essentielle entre exhiber ses biens matériels, son suv, ses sacs et habits griffés, sa piscine privée et villa surveillée par les caméras détecteurs de mouvements et être tout simplement heureux, parce qu’on aime, la vie ou les gens.
RépondreSupprimerGaspard
Oui, vous avez tout compris : la différence fondamentale se situe dans l'être ou l'avoir. Quand on pense posséder (le bonheur, l'amour, la joie) quand on veut thésauriser et entamer une compétition avec l'autre, il y a toujours indécence (on pourrait même dire : imbécillité). Mais quand on se vit heureux, aimant, joyeux, quel mal y a-t-il à l'être ? On peut être heureux et faire circuler sa joie. Il y a aussi de la joie à voir de la joie chez les autres. On peut y puiser de l'énergie et de l'inspiration. Belle soirée, GAspard!
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