Portrait de deux jeunes hommes / Anonyme vénitien XVIe / Le Louvre / Paris
La femme est arrivée dans le hall en tenant sa petite fille par la main. En mal de biberon, l'une exigeait de l'autre qu'elle se dépêche de trouver du lait tiède. Elle miaulait, du haut de ses quatre-vingt centimètres et tandis qu'elle miaulait, elle agitait sa drôle de tête : on aurait dit un mouton buté. Sa laine dessinait des ronds sur son crâne. Elle n'était pas frisée, non, c'était une blonde carrément crépue à l'indéniable charme obtus.
Sa mère était mince, voire maigre, son visage pâle révélait difficilement son âge. Elle avait une longue tignasse grise, légère et qui gonflait autour de son évanescente silhouette. De longs fils blancs s'entremêlaient dans ses cheveux noirs. N'eut été l'intense lassitude qui émanait de sa personne, elle aurait pu être belle, d'une beauté originale, de celles que certains relèvent et que d'autres rejettent. Elle tentait d'apaiser son enfant avec quelques mots d'hébreu tandis que la petiote et son doudou s'agitaient entre ses jambes.
Quelques heures auparavant, à la terrasse d'un restaurant, une très jeune élégante - six mois à tout casser - exhibait une coiffure très tendance. Une frange franchement rouquine, quelques bouclettes blond vénitien, et le reste du crane rasé de près en une coupe que n'aurait pas reniée Jean-Paul Gaultier dans ses défilés.
Face à tous ces exemples invitant à être et laisser être, me suis empressée d'annuler mon rendez-vous et suis repartie vers le fleuve avec mes mèches ensauvagées, que le Mistral avait tourneboulées.
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