mardi 3 octobre 2023

Vivre : pour qui, pour quoi ?

 
 Muse / provenant du Studiolo de Lionello d'Este / Palazzo dei Diamanti / Ferrare
 
Sur les blogs allemands que je suis, le thème de la lassitude et de la persévérance s'est invité tout dernièrement. Pour qui, pourquoi tient-on un blog à l'heure où la tendance est au défilement des images et à la concision des mots ? A plusieurs reprises cet été, parlant de créativité avec ses invités sous le soleil de Platon, Charles Pépin avait évoqué deux voies possibles pour garder en soi l'énergie nécessaire : soit on est porté par son désir (et dans ce cas, on ne se préoccupe pas d'être approuvé ou reconnu), soit ce sont les manifestations de reconnaissance des autres qui vous poussent à continuer. 
 
Les participantes allemandes ont alimenté le débat. Chercher à tout prix du carburant à l'extérieur, c'est-à-dire des signes d'approbation, se révèle valorisant pendant un certain temps, et finit par devenir inévitablement épuisant. Il est difficile de concilier l'élan porteur et les concessions nécessaires à la séduction dans l'air du temps. Plaire au plus grand nombre, s'adapter à ce qu'on croit devoir montrer peut rendre exsangue sur le plan énergétique.

Il s'agirait plutôt d'une question d'envie et de plaisir. Ou plus précisément : il ne devrait être question que d'envie et de plaisir. Que l'on ait besoin de se connecter pour socialiser, exposer ses créations, s'exprimer ou échanger des stimulations, le désir et le besoin devraient toujours être les moteurs. Il s'agit de faire appel à des pulsions qui partent de soi (et tant mieux si elles rencontrent une authentique attention et une belle réciprocité). Le reste : les amabilités convenues, les statistiques, les like, les signes éphémères de réussite et de félicité, tous ces jeux, tous ces appels directs ou indirects à consommer, y aurait-il encore des gens sensés aujourd'hui pour y croire et se laisser impressionner ? C'est la question centrale que se posaient la plupart des personnes en discussion. Elles en appelaient à la sincérité, une sincérité qui ne rime pas avec le fait de tout dire tout montrer (quand donc serait-il possible de tout révéler?), mais une sincérité envers soi avant tout. Plus grand est le fossé entre la vitrine et le vécu, plus l'effondrement est assuré.
 
Et c'est sans doute parce ce groupe s'interroge avec franchise et perspicacité qu'il est agréable de les suivre chacune avec son univers, plus ou moins complexe, étonnamment personnel et néanmoins relié.


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire