mercredi 24 octobre 2018

Regarder : sans légende



Le travail du photographe Matthias Bruggmann (né en 1978) porte sur les conflits du monde contemporain. L'artiste s'est vu décerner le prix Elysée l'an dernier pour son travail tendant à susciter chez le spectateur "une compréhension viscérale de la violence intangible qui sous-tend tout conflit". Le musée présente jusqu'au 27 janvier une série de 33 tirages, provenant du travail consacré par M. Bruggmann au conflit syrien pendant près de six ans.
Une exposition coup de poing, car les photographies sont présentées au visiteur sans titre, ni contextualisation (les légendes ajoutées ici sont tirées d'un dépliant annexé). A regarder ces images, en face à face, en silence, on comprend combien les informations provenant des médias, encadrées, commentées, tendent à banaliser la réalité, à nous la rendre dans une certaine mesure "acceptable".



SHINSHIRAH, REEF IDLIB, 19 MAI 2014. Fillette d'une famille déplacée au milieu des ruine d'une ville byzantine abandonnée. Les familles vivaient sous terre dans des caveaux funéraires dans l'espoir d'être ainsi protégées des bombardements.


QAZZAZ, DAMAS, 10 mai 2012. Des employés inspectent les décombres d'un bâtiment après un attentat visant la branche 235 (dite "Palestine") de la sécurité militaire. La branche Palestine est, dans l'horreur, l'une des pires et, avant la guerre civile, le savoir-faire en matière de torture de ses employés a été utilisé notamment par le Canada et les Etats-Unis pour "interroger" des suspects.


ISH AL-WARWAR, DAMAS, 5 MAI 2012. Un homme observe les combats à Barzeh, en contrebas. Beaucoup d'employés des forces de sécurité vivaient à Ish al-Wawar, leurs enfants allaient à l'école avec les enfants des manifestants de Barzeh. Au-delà de la question confessionnelle, la rixe est devenue communautaire. Sur le plan socio-économique, Barzeh et Ish al-Warwar avaient en tout en commun, mais parce que de nombreux hommes d'Ish al Warwar travaillaient pour les forces de sécurité, les deux quartiers s'affrontèrent rapidement.

Mathias Brugmann / Un acte d'une violence indicible / Musée de l'Elysée / Lausanne

3 commentaires:

  1. Coucou. Parfois, il n'y a pas besoin de mots pour décrire la violence et la haine dans notre monde. Je ne suis pas sûre que je pourrai aller voir une telle exposition. Bises de plaine automnales et venteuses.

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  2. Je te comprends : visiter Nuremberg a été un calvaire pour moi l'été dernier. Et je sors bouleversée des musées ou des monuments à la mémoire de la Shoah. Mais, là, curieusement, j'ai trouvé plutôt sain d'être confrontée à l'horreur de la guerre. J'ai réalisé combien nous finissons par être blindés face aux nouvelles déversées par les médias. Trop d'infos tuent l'info. Là, on réalisait l'horreur. c'était douloureux et en même temps j'en suis sortie 1/ avec l'envie de faire quelque chose en faveur des populations concernées 2/ reconnaissante envers ce pays, le nôtre, qui nous permet de vivre en paix. Savoir que nos impôts sont dévolus à la construction d'écoles, de routes, à la recherche, au bien commun est extrêmement rassurant. J'ai mesuré ma chance. Je vais rechercher des itws de ce M. Bruggmann, j'imagine qu'il ne doit pas être facile de faire ce type de travail. Très belle soirée à toi (on nous avait annoncé la pluie : le soleil nous sourit. Vive la vie!!!)

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    1. Oui, vive la vie! Merci Dad. Et belle soirée aussi. Ton soleil est le même qui illumine de doux rayons les 4000 en face.

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