Fresque / Sacra di San Michele / Torino / Piémont
A propos de cet homme qui l'avait trompée, dont elle avait divorcé et qui venait de retrouver une vingtaine d'années plus tard son ancienne maîtresse, l'ex-épouse blessée a prononcé en anglais : It's only blood under the bridge.
Il a coulé de l'eau sous les ponts, dit le français. Le temps a passé, on n'a plus besoin de se sentir lacérée. Depuis longtemps, les armes ont été déposées.
Mais la nuance de l'anglais pour signifier "ce qui est fait est fait" fait référence à la souffrance : il a coulé du sang sous le pont. Oui, c'est du passé, ce qui est fait est fait, mais que ça faisait mal, ce sang, cette douleur que le présent était venu rappeler.
Il faut que beaucoup d'eau coule sous le pont et pendant longtemps pour laver le sang des blessures profondes, comme la trahison amoureuse, par exemple.
RépondreSupprimerEt même les gens qui pensent être totalement étanche rapidement n'échappent pas aux brèches quand certains événements viennent éperonner fortement. On risque de prendre l'eau et tout ce qui n'a pas été fait est à faire.
Ce billet a deux niveaux : 1/ la manière dont les langues expriment de manière différentes une réalité qui est la même. Les langues et les mots parlent aux gens dans leur quotidien. Utiliser le mot "sang" c'est visualiser la blessure subie. En ce sens, cela peut être plus fort et plus parlant.
Supprimer2/ le niveau dont tu parles, le fait que beaucoup de temps, de soins, de patiente reconstruction sont nécessaires pour atténuer la souffrance subie lors d'une expérience traumatisante (relationnelle au sens large). Dans ces cas-là, nier, ou affirmer, ou croire qu'on est étanche, c'est effectivement se condamner à revivre et à resouffrir. Si je comprends bien ce que tu dis, tu penses que les blessures profondes peuvent finir par être lavées, avec un bon accompagnement, une recherche bienveillante, un travail sur soi et sur les circonstances ? En ce qui me concerne, je crois qu'on ne guérit jamais totalement. La blessure, en tant que cicatrice reste, la mémoire reste, et même si on ne souffre plus autant, même si on va de l'avant, il reste le souvenir des larmes qui ont coulé. Et la blessure est quand même ravivée.
ça mène à la question : que faisons-nous avec nos cicatrices et nos larmes anciennes ? dans l'idéal : du positif, de l'aide, de l'empathie, de la solidarité.
merci pour ton commentaire et belle soirée.
La question d'une « guérison des blessures »… et une vaste question… qu'il n'est pas possible de développer ici.
SupprimerChaque personne est un cas spécifique. Une guérison de certaines blessures ça existe, j'en témoigne personnellement et dans ma pratique professionnelle. Une guérison totale de tous les traumatismes qu'on a pu vivre plus ou moins profond plus ou moins intense, c'est effectivement du rêve à ne pas cultiver.
Il y a une différence entre une blessure qui ne cesse de saigner parce qu'on ne fait aucun traitement, et une blessure traitée qui cicatrise, même si la cicatrice est parfois douloureuse dans certaines circonstances, occasions , relations « qui rappellent et réveillent », et entraîne des désajustements complexes à gérer. La perfection n'existe pas, ni ici, ni ailleurs, et il est évident qu'y croire relève de la pensée magique.
J'ai une petite règle qui me guide autant que faire se peut : assainir une histoire personnelle dans les aspects qui entravent la mise en œuvre de ce que l'on est appelé à vivre et accomplir dans l'existence. Le reste… comme on dit dans le Nord : « on fera avec » !
Pour le premier niveau, j'avais bien compris, même si je ne suis nul en langue étrangère. En ce sens j'ai échangé plusieurs fois avec un de mes petits-fils qui parle couramment anglais, allemand depuis l'enfance. Pour ses études il est actuellement en Suède et apprend donc le Suédois. Je ne vais pas détailler mais la spécificité et la syntaxe de cette langue telle qu'il me l'explique me permet de manière sous-jacente de voir une certaine nature d'un peuple qui n'est pas latin.
Merci pour ta réponse et belle soirée à toi aussi.
Hello. Je trouve ta réponse ce matin et t'en remercie. Je te rejoins entièrement, en particulier quand tu écris : "assainir une histoire personnelle dans les aspects qui entravent la mise en œuvre de ce que l'on est appelé à vivre et accomplir dans l'existence". C'est tellement bien exprimer qu'il n'y aurait rien d'essentiel à ajouter.
Supprimerquant aux langues, je crois qu'elles nourrissent constamment notre imaginaire par des ... images justement : "avoir le cœur lourd" ou "brisé" donne une illustration à nos sentiments (simple exemple). Très belle et lumineuse journée à toi.
"exprimé", naturellement, pardon (mes doigts gelés!
SupprimerCe matin, Bernard Campan, chez A Trapenard, disait que ”les blessures ne s’effacent jamais.Il faut juste les rendre plus dociles. Pour ma part, je trouve la formule tout à fait exacte et jolie.
RépondreSupprimerA chacun son chemin de vie!
Oui la formule de Campan est jolie. Dociles... disons que les blessures ne devraient pas être des entraves à vivre dans le présent. Reconnues, oui, soignées, oui, revécues, c'est inévitable quand elles se rappellent à notre souvenir, mais elles ne devraient pas être un obstacle à vivre les opportunités qui se présentent.Dommage de gâcher des expériences présentes par peur des souffrances anciennes. C'est presque... s'infliger une double peine.
SupprimerBelle soirée à vous (ici : coucher mirobolant, vent à écorner les bœufs et primevères sur les chemins)