samedi 13 février 2021

Vivre : avant les giboulées

 
Paysage d'hiver / Pieter Brueghel le Jeune / KHM / Vienne
 
 
Loin de se laisser idéaliser, l'hiver se montre teigneux ce matin. Peu commode, peu arrangeant, pas vraiment engageant. Les sols craquent sous nos semelles. Détrempés hier encore, les voici qui nous opposent à présent une résistance rêche et rebelle. Traces de sabots, traces de pas, traces de passages, mais pas un chat : seuls quelques vols furtifs ça et là. Le chien enrage de ne pouvoir forcer les terriers, voudrait se désaltérer à des rigoles figées. Le ciel s'est fait mutique, oppose une plaque opaque à nos regards ébétés. Tout semble se taire, sauf, de loin en loin, un arbre qui penche, se balance puis, se reprenant, pousse un gémissement glaçant. Instinctivement, on s'écarte. Par-delà les champs, on suit des yeux deux fumées fuyant leurs cheminées chagrines. On perçoit la buée de nos rares mots prononcés. On ressent le baiser d'un brouillard fourvoyé. Un souvenir ancien vient nous effleurer. Et voici qu'un chevreuil transi, perdu dans ses rêveries, indifférent, imprudent,  trop confiant, passe et manque nous frôler. On sourit. On bâille. On frissonne. Décidément, on aurait dû mieux s'habiller. Le temps est venu de rentrer.

3 commentaires:

  1. Il est très beau et dense ce texte. Une prose poétique sur l'hiver. Tu as le talon de nous faire partager ses rigueurs engourdies
    j'aime beaucoup ta qualité d'évocation..

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    1. Merci. Brrr! Je rentre de balade justement. Même météo, un renard au loin, quelques corbeaux, qui fuyaient le froid. Avant de me mettre à éternuer, je te souhaite une toute belle !

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    2. Merci ! Ce sera une belle journée puisque c'est la fête des amoureux !
      Et ce matin grand ciel bleu pour nous saluer !
      (Je vois que j'écris tu as le « talon » au lieu de talent ! Ce que c'est que d'utiliser le machin à dicter !!…)

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