Le berger bulgare (auparavant appelé berger karakatchan) est une race de chien de berger originaire des Balkans et élevée en Bulgarie. C'est une race canine préservée grâce au peuple karakatchan et à ses traditions pastorales. Les bergers bulgares n'hésitent pas à s'attaquer au loup et à l'ours. En Bulgarie, ils sont appelés volkodav qui signifie « égorgeur de loup ». Dans les bergeries, ils ont la queue et les oreilles coupées afin de ne laisser aucune prise aux loups. Il existe aussi en Bulgarie une race chevaline et une race ovine de ce nom karakatchan. [Wikipedia]
Le dernier tome de la tétralogie que Kapka Kassabova a consacré à ses terres d'origines, au sein des Balkans, va bientôt paraître en français. Impatiente de le découvrir, je viens de lire la version italienne. L'écrivaine voyageuse d'origine bulgare domiciliée en Écosse clôt ici son opus en racontant l'histoire des peuples nomades Karakatchan, les derniers bergers qui s'efforcent de sauvegarder les races animales du même nom aux confins de l'Europe, sur les hauteurs du Mont Pirin Comme à chacun de ses voyages, elle participe de près à la vie quotidienne des personnes et les bêtes et relate ses expériences à leurs côtés avec une extrême délicatesse et une attention affutée.
Là-haut, tu dois te confronter avec tes démons. Toutes tes peurs émergent, mais tu découvres aussi à quel point tu es coriace. Si vous voulez savoir de quoi vous êtes faits, allez passer une semaine dans la nature. Sans téléphone.
Les chiens de garde sont l'unique espèce sur la terre qui a une triple identité. Ils s'identifient aux chiens, aux humains et aux brebis. Certains de ces chiens sont plus intelligents et loyaux que bien des humains. Toutefois, il y a une autre vérité concernant le monde des bergers : les besoins des animaux passant avant les besoins des personnes. Les bergers comme Sášo sont réellement les derniers gardiens de ces montagnes. [interview donnée à ilboLiv / università di Padova]
Photographie de K.K.
Être berger est une chose simple, mais ce n'est pas un métier pour des gens simples.[p.41]
L'auteure suit les troupeaux dans leurs transhumances accidentées, relatant la vie des personnes au gré de leurs progressions, mais s'attachant surtout à décrire leurs chiens, qui deviennent les protagonistes centraux du récit. La vie sur ces hauteurs n'est pas facile et les relations non plus. K.K. progresse lentement dans son récit et celui-ci est à l'image de son voyage : une avancée patiente et obstinée, ayant duré plusieurs mois, tout le contraire des incursions kleenex all inclusive. Il s'agit pour elle tout d'abord d'apprivoiser une petite communauté retirée et sauvage, d'observer les codes et puis, peu à peu, de se faire une place parmi ces êtres marginaux qui vivent aux marges de la civilisation.
Photographie de K.K.
La lecture peut sembler exigeante car elle suit le rythme de la marche. Le pastoralisme est un art de la patience. Ce qui frappe toujours quand on lit Kapka Kassabova, c'est son incroyable capacité à se fondre dans le monde de l'Autre, à accepter ses logiques, à écouter pour mieux connaître. En plus de sa culture et de son talent d'écriture, elle fait preuve d'une ouverture d'esprit et d'une immense empathie. De ce fait, les gens lui font confiance. Ils l'intègrent dans leur existence et finissent toujours par se raconter car elle est capable d'entendre leurs douleurs les plus intimes.
On pourrait dire que l'auteure est une poétesse avec une incroyable résistance physique et mentale. On pourrait dire aussi que c'est une "psychogéographe". Dans tous les cas, elle décrit des territoires, des destinées, des êtres profondément marqués par les bouleversements du XXe siècle, les guerres, l'imposition de frontières, le Rideau de fer, les réquisitions, sans compter à présent l'arrivée de nouveaux maîtres décidés à s'emparer des lieux pour mieux les exploiter.
On sent l'écrivaine désireuse de mettre tous ses talents au service de la nature et de sa préservation. On la sent aussi déchirée entre les deux mondes extrêmes : ceux qu'elle parcourt en quête d'authenticité et ceux qui sont définis "civilisés", où l'appelle la partie promotionnelle de son travail (précisons qu'après avoir vécu plusieurs années à Édimbourg, elle s'est établie maintenant dans les Highlands et que cette région fera l'objet de ses prochains écrits).
La Terre nous survivra, mais nous je ne sais pas si nous pourrons lui survivre. Dans notre course pour "sauver la planète" nous sommes seulement en train de faire des choses stupides et néfastes : placer un parc éolien sur chaque colline et électrifier à outrance. Ce n'est pas la Terre que nous voulons sauver de cette manière, mais notre style de vie super urbanisé.
A paraître en français le 20.08.2025 / éditions Marchialy
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