dimanche 30 septembre 2018

Vivre : le manque


Punta della dogana / Venezia

Chaque année, à fin septembre, ça me reprend :
je me souviens des mois passés là-bas, 
de cet automne qui n'en finissait pas
(y a-t-il du reste eu un hiver cet hiver-là?)
des étudiants flamboyants sur les Zattere, 
des cours plus rasants que la lumière,
et des flots ambrés, et des façades qui tanguaient
et cette impression d'irréalité qui ne me quittait pas :
le matin sortir de chez moi, bifurquer au coin d'une calle
et me retrouvée assommée, grisée, aveuglée par la Piazza. 

samedi 29 septembre 2018

Vivre : dans la cabine


Palazzo della Ragione / Padova

A force d'entendre "superbe, on prend" devant n'importe quel vêtement,
j'ai dû renoncer à le laisser entrer.

vendredi 28 septembre 2018

Lire : une séparation, une réparation




5/ Abandonner l'idée qu'un dieu malveillant augmente le quota des heures pendant le week-end et m'oblige à élaborer des programmes de folie pour atteindre le cap d'un lundi ordinaire.
71/ Penser à toutes celles qui se battent et qui se retrouvent seules, au milieu des cartons, sans meubles, à se demander pourquoi elles revivent une situation d'étudiante : les mêmes maigres moyens, mais l'espoir du commencement en moins. Pleurer un bon coup et envoyer des messages pour que des paroles amies viennent meubler leur 6ème étage, chambre de bonne, aujourd'hui où plus aucune bonne n'habite le 6ème, sauf dans les films ringards. 
80/ Partir. Prendre la route comme au temps du duo. Charger la voiture sans m'énerver, couper le gaz et la chaudière. Laisser les tortues déambuler. M'apercevoir au dernier moment que toutes les cartes routières ont disparu. Nouvelle stratégie pour me faire perdre le nord ou me perdre tout simplement ? Même le GPS ne veut plus se brancher. Acheter in fine une carte de France. Hésiter longuement entre la version IGN ou Michelin et choisir l'IGN : en duo, nous ne jurions que par Michelin. Changer de direction! Avec toutes nos cartes, le nouveau duo, formé sans moi, doit réviser la géographie.
J'avais apprécié Celles qui regardent. Vita Nova solo vient de paraître et se dévore aisément sous le doux soleil d'automne. Marcelline Roux écrit comme on dessine : par traits et par esquisses. Elle raconte de manière peu banale une histoire terriblement banale : comment elle s'est fait débarquer au bout de 25 ans par son disjoint (parti refaire sa vie avec une jeunette) et comment elle traverse le chemin de sa désolation et de sa reconstruction. Un journal condensé en 567 petits textes qui déclinent son parcours sur trois années. 
Ça pourrait être un long et pénible lamento, mais l'auteur est sincère, ne manque pas d'humour et de lucidité pour raconter ce deuil et sa traversée. Sans compter la poésie :
472/ La pluie est autant de larmes économisées. 
Les éditions Rhubarbe, basées à Auxerre, méritent d'être soutenues : un petit éditeur passionné, des auteurs peu connus. Juste un bémol : pourquoi affubler ce petit livre d'une préface qui a tout d'une explication de texte ? Ceux qui lisent auraient donc besoin qu'on les prennent par la main et l'écrivaine nécessiterait une exégèse?

jeudi 27 septembre 2018

Regarder : regarder, regarder, regarder






Regarder, regarder, regarder. Jusqu'à en être saoul de regarder. Et puis on attend. On attend avec une espèce d'espoir complètement fou, irraisonné. Et puis les gens viennent se mettre dedans et clac, on fait la photo. (conseil de Robert Doisneau pour faire une bonne photo)
Cet été, Arte a diffusé le documentaire réalisé par Clémentine Deroudille, sa petite-fille. On y découvre l'homme, par-delà son oeuvre photographique. Une anecdote, racontée par un comédien de ses amis, est frappante :
On est entrés dans un bistrot. Robert s'est adressé aimablement au serveur, qui lui a très mal répondu. Robert lui parlait et le serveur continuait à mal lui parler. Après, quand on est sortis, je lui ai dit : non, mais t'as vu comment il te parlait, le mec? et Robert m'a répondu : qu'est-ce que ça peut te foutre, t'as l'intention de vivre avec ?
Superbe répartie, qui illustre bien une attitude saine face à la vie. Comme le dit François Morel dans le film : On se dit, il y a les photos, il y a le métier, mais il y a bien plus, il y a la vie.

mercredi 26 septembre 2018

Vivre : let it be / 15


Portrait d'une femme inconnue / G. Klimt / Belvédère / Vienne

Un couple  du voisinage venu dîner : Lui, paisible et débonnaire, un peu déboussolé par la récente retraite vers laquelle on l'a poussé. Elle, plantureuse notable à l'ego bien dimensionné, passe son temps à énumérer ses nombreux privilèges. Elle évoque à tout bout de champ son pouvoir d'achat et son poste extraordinairement bien rémunéré ( (elle est représentante pour des machines médicales). Elle affirme péremptoirement que la vue sur le lac a un effet stressant (sa maison donne sur la route cantonale). Nos deux enfants travaillent comme avocats (mais elle tient à préciser que sa fille collabore au sein d'une importante multinationaaaale). Elle part deux fois l'an faire les soldes à Hambourg (elle jette puis rachète d'année en année les mêmes chemisiers et les mêmes classiques chandails).  
R. - la bonté personnifiée - s'obstine à les inviter. Les gens fonctionnant en mode "faire" et en mode "paraître" ne m'exaspèrent plus depuis longtemps, mais ils me lassent. J'aspire aux échanges vrais, j'ai besoin de rencontrer le cœur des personnes, et non le contenu de leur porte-monnaie. Je préfère évoquer le goût d'un souvenir plutôt que le coût d'un circuit organisé. Je désire l’authentique,  je rejette le contreplaqué. A chaque fois, en les regardant repartir, je déplore le gaspillage d'une soirée.

mardi 25 septembre 2018

Vivre : perplexité


Dalle tenebre alla luce / Michele Balugani / Ferrara / 2018


Ado, je me souviens, ma mère me disait quand je m’apprêtais à sortir :
Change de slip, on ne sait jamais ce qui peut arriver.
J’en suis encore à me demander ce qui aurait bien pu m'arriver...

lundi 24 septembre 2018

dimanche 23 septembre 2018

Vivre : les voix de la prière

Atlas / Maroc / 2010

Parfois au réveil, parfois au moment du coucher
Parfois au cœur d’une conversation, en pleine méditation
Percevoir peu à peu, puis tendre l’oreille, subjuguée, 
Happée par ces sons flottants, émouvants, fendant les airs.


samedi 22 septembre 2018

Voyager : en questions


Atlas / Maroc

Notre hôtesse se présentait comme amoureuse du pays (elle appartenait à cette catégorie de personnes qui ont trouvé leur vérité au Maroc). Nous l'avons entendue, soir après soir, raconter son histoire, la même histoire, un storytelling bien rôdé, fait de merveilleuses aventures humaines et de rencontres authentiques.

Vérification faite sur TA, l'établissement affichait des prix plutôt haut de gamme. Bien plus élevés que ceux appliqués par certains cinq étoiles de la Palmeraie. On se voulait ici prestataire de standing et d'élégance.
Or, les nettoyages et la propreté se sont révélés somme toute sommaires. La décoration succincte, voire kitsch. Le coût des repas présentés ne devait pas s'élever à plus de cinq euros par jour et par personne (desserts constitués d'oranges à la cannelle, tranches de pastèque et de melon). Leur avantage était d'être simples et goûteux. Des légumes, peu de viande, pas vraiment de morceaux nobles.

En fin de semaine, nous avons appris que le propriétaire était un restaurateur prospère habitant en France. En clair, cette villa décrite comme familiale était un investissement. L'hôtesse s'affichait comme une "amie" de cet homme. C'est sur son compte bancaire en France que nous avons versé nos deniers. Au hasard d'une conversation, elle a évoqué le fait qu'elle résidait là pour l'instant sans permis.

J'ai appris par la suite que sur les quatre employés (un gardien, une cuisinière, une femme pour le service et un chauffeur occasionnel) seul le premier était officiellement engagé et bénéficiait d'une couverture sociale. Les autres étaient des extras, auxquels on avait recours selon les besoins. La précarité à l'état pur.

Au moment de partir, il a été question de bakchich. Il s'agissait de donner un pourboire pour les services rendus. Une recherche sur google m'a appris que les employés sont très mal payés et qu'ils comptent sur les pourboires pour vivre (le salaire moyen d'un employé déclaré est d'environ 200 euros par mois, les autres reçoivent beaucoup moins). Ces récompenses constitueraient la moitié des revenus des Marocains qui travaillent dans le tourisme.

Question : si nous étions une douzaine, si nos chambres avaient, d'après TA, la valeur d'un quatre étoiles français, si les frais de nos repas ne dépassaient pas 5 euros par jour, si les quatre employés étaient rémunérés dans leur ensemble à raison de 30 euros par jour, qui s'en mettait plein les poches?

Je ne suis nullement experte en voyages organisés (à vrai dire, celui-ci était ma deuxième expérience). Je voyage régulièrement et j'essaie d'organiser mes séjours de manière censée. Avec le temps, j'ai appris à me méfier des propositions factices sur airbnb, et de certaines notations mirobolantes sur les sites de réservation. L'idéal, selon moi, ce sont les contacts personnels avec les établissements, des propriétaires locaux de petites structures si possible. Les revenus du tourisme doivent rester dans le pays qui offre les prestations. Le fait que certains sites de réservation prélèvent à distance entre 15 et 18% du montant facturé paraît nettement exagéré au vu de leur contribution. Ce qui correspond le mieux à mes critères, ce sont mes séjours en Croatie : chez l'habitant, avec des échanges directs et des indemnités allant sans intermédiaire aux prestataires du travail fourni.

Mon constat, après ce séjour, est plus que mitigé. On voyage de nos jours de plus en plus et voyager, c'est être un consommateur. A ce titre, cela demande d'être toujours plus vigilant. Le tourisme est vital pour bien des régions de la planète. C'est une manne. Le tout est de savoir à qui profite la manne. En acceptant d'entrer dans le jeu du flou et des intermédiaires, on devient complice d'une exploitation. J'ai toujours adoré la terre marocaine, ses habitants, ses couleurs, ses chants. Promis juré, lors de mon prochain séjour, j'organiserai à nouveau mon voyage, et de telle sorte qu'il profite aux enfants de là-bas et leur assure un véritable avenir en assurant un véritable salaire à leurs parents.

vendredi 21 septembre 2018

Vivre : métro boulot bobo


Oasis de Fint / près de Ouarzazate / Maroc

Quand on traverse un désert, on souffre.
Et quand on souffre, on tend à se murer.
On se tait, on est en proie à une honte âpre.
On s'exhorte à tenir, on veut faire face.
On a la rage, on a le rouge au front.
On essaie de dormir, on essaie de rester droit.

Un jour, après le repas, les langues se sont déliées.
Les gens se sont mis à parler. Ils se sont mis à raconter.
Alors, chacun a su que le mobbing et le BO,
ce n'était pas l'exception, qui vous marque au fer chaud.
Chacun en avait fait la cuisante expérience, 
dans sa chair, ou à travers la chair d'un proche.
Oui, chacun à sa manière, avait ses casseroles à nettoyer.
Des plaies professionnelles à panser. 

jeudi 20 septembre 2018

Vivre : restons groupés


Fantasia / chez Ali / Marrakech

A mon retour, on m'a dit : quelle chance d'avoir pu partir là-bas! 
De mon côté, j'ai pensé comme à chaque fois : plus jamais! plus jamais ça!
Comment expliquer l'intense décalage entre l'expérience et les images ?
Entre les sourires capturés et les situations qu'il a fallu sans cesse gérer ? 
Je suis partie suivre ce stage avec des gens que je connaissais peu ou pas. 
Or, les groupes sont toujours source d'inconfort, voire d'anxiété pour moi.
Mon enfance m'a appris à apprivoiser la solitude et ses multiples richesses.
J'y ai inventé des jeux et des mondes grandioses où je me lovais avec ivresse.
Rien ne m'a préparée aux agitations des groupes et à leurs enjeux.
Je m'y sens souvent comme un poisson sur une branche. J'aspire au silence.
Je voudrais fuir, retrouver ma bulle, alors qu'il s'agit de rester et partager :
Partager la table du petit-déjeuner, celle du déjeuner et celle du dîner.
Accepter les contrariétés, les dissonances, les alliances, les différences.
Les plaintes, les susceptibilités, les règles imposées (ou manipulées).
Profondément solitaire, je me sais pourtant viscéralement solidaire.
Je vise l'harmonie, je suis remplie d'attentions, je déniche des solutions.
Mais, si chaque membre, dans son individualité, révèle sa beauté,
à partir de cinq personnes, tout devient trop agité, trop compliqué.
J'ai quitté sans regret l'aéroport, les embrassades, les mains qui voltigeaient.
A présent, les photographies se déploient dans la lumière de l'après-midi.
Je respire, je me souviens, je me sens bien, ici, juste ici...

mercredi 19 septembre 2018

Voyager : le goût des départs


Médina / Marrakech

C'est un goût spécial.
Le goût de l'Autre, le goût d'ailleurs.
Il vous saisit sur le tarmac : la lumière, les senteurs.
Il vous saisit dans la file lente, passeport contre passeport.
Il vous capte par des sourires, des regards, des accents.
Il vous emporte parmi le chant des palmiers et du vent.
Vous voilà soudain happé de toutes parts, ne sachant où donner du regard
dix mille flashes par instant. Vous voilà soudain ennivré débutant.

mardi 18 septembre 2018

Vivre : restons zen (du moins : essayons)



Soirs d'été / Palmeraie / Marrakech

Si vous avez l’impression que vous êtes trop petit pour changer quelque chose, 
essayez donc de dormir avec un moustique. 
Vous verrez lequel des deux empêche l’autre de dormir. 
Dalaï Lama


Le lieu était idyllique.
La piscine turquoise.
Les mets succulents.
Les visages souriants.
...
Les punaises turbulantes.

lundi 17 septembre 2018

Vivre : le retour du printemps


Cappella Brancacci / Masaccio/Masolino / Florence



Il a parfois des virevoltes soudaines, graciles qui lui donnent des airs de prince renaissant, d’éternel adolescent.

lundi 10 septembre 2018

Habiter : l'amour fou


La leçon de musique (détail) / J. Vermeer / Coll. reine Elisabeth II


En quittant ma maison – et plus longue mon absence, plus aigu le phénomène – je ressens son manque anticipé et intense.
En quittant ma maison, je tourne comme une tornade, je vais je viens j’erre de manière insensée
et ce ne sont pas les meubles ni les murs que j’ai besoin d’étreindre.
J’ai besoin de saluer encore et encore la lumière de l’aube paressant sur les carrelages,
 et les bruissements des feuillages, et les plumes des pies effrontées qui ajoutent leur caquetage 
à tous les murmures de la forêt. Un châle défait qui doit être replié. 
La moitié d'un citron que je ne pourrai pas terminer. Un roman abandonné par terre. 
J’ai besoin de les reconnaître tous – les embrasser du regard.
Quitter le lézard qui lézarde sur sa terrasse m’arrache le cœur (sera-t-il bien là à mon retour ?)
Quitter le grillon égaré là, sur le bord du cadre (qui, à part moi, saura le sauver ?)
En quittant ma maison, je délire. Je délire sans mesure. 
Si partir, c’est mourir un peu, à chaque fois j’agonise et j'aspire au retour.

dimanche 9 septembre 2018

Vivre : au bord de la palmeraie






A. est sage-femme. Elle est femme et elle est sage. Elle sait apprendre des poésies pour les redire par cœur en y mettant toute son âme.
S. a un pedigree tellement long qu'il est impossible de le dérouler. Elle enseigne ses savoirs sans en faire toute une histoire et a des clefs ouvrir bien des portes cadenassées.
F., qui vit là-bas, raffole du chocolat aux noisettes et semble douée pour tout coordonner. Et puis, il y aura B. et P. et d'autres que je ne connais pas. A nous tous, nous constituerons la moitié d'un alphabet. Nous allons nous étirer comme des chats et nous connecter sans moyens sophistiqués. 

samedi 8 septembre 2018

Vivre : les feux de l'amour



Trogir / Place Ivana Pavla II / 25.08.18


Il se passe toujours quelque chose sur cette place de la cathédrale.
Tôt le matin, ou tard le soir, il y a toujours quelque chose à voir.

Ce jour-là, à nuit tombée, un homme et une femme se sont unis
en présence de toute leur parenté et de tous leurs amis.
Ils se sont dit oui, peut-être pour la vie, en présence de leur petite fille.
Les flambeaux rouge intense qui ont accueilli leur sortie
et les chants vigoureux avaient un je ne sais quoi de noble, de saisissant.

Mais le plus captivant, c'étaient les visages des badauds et des curieux.
Chacune des personnes présentes, arrivées de l'autre bout de la terre,
regardait la scène à sa manière, à la lumière de sa propre histoire.
Elles assumaient les expressions de toutes les émotions humaines :
curiosité, attendrissement, enthousiasme, stupeur et même... terreur.

Et on aurait pu, en les observant, déterminer leur opinion sur le mariage,
leur attirance ou leur répulsion (très peu d'indifférence) envers ce type de serment.


vendredi 7 septembre 2018

Vivre : les abonnés absents


Montée vers le col / Versant italien / Grand- saint-Bernard


Ces derniers mois, il y a eu dans ma vie le silence de deux ou trois personnes. J’attendais beaucoup de ces deux (peut-être trois) personnes. J’attendais le son de leur voix, j’attendais leur soutien. J’attendais des mots d’encouragement et de reconnaissance. J’en avais terriblement besoin. Mais j’attendais probablement trop, j’attendais quelque chose qu’elles ne pouvaient pas me donner. Leurs mots ne sont pas venus. Parfois, on ne reçoit pas quelque chose qu’on attend, dont on éprouve intensément le manque, et on doit accepter ce qui est. Juste accepter ce qu’on n’aura pas.

Il faut admettre le silence et le vide qu’on aurait voulu voir comblés par deux ou trois personnes.

Un jour d’été, ayant franchi le col, en contrebas de la montagne, on se tient droit, face à la lumière vive, face au spectacle mirobolant qui s’étale sous nos yeux, dont les couleurs commencent à chauffer sous l’effet du soleil, et on accepte qu’on n’a aucun pouvoir sur le désir des autres (les entreprises de séduction semblent des manipulations tôt ou tard vouées à s’échouer). Alors... on respire. On respire encore et encore jusqu’à ce que la beauté de cette merveilleuse journée quasi automnale nous apparaisse dans toute sa splendeur, nous rende acceptables le silence et le vide et les ramène à leur absolue banalité.

jeudi 6 septembre 2018

Vivre : Still life / 52




Légères, plutôt rigolotes, liantes, pas compliquées.
Indispensables. Plates. Confortables. En cuir, si possible.
Elles s'entendent comme larrons en foire avec mes pieds,
(pourtant nudistes invétérés)
Ils font ami-ami pendant toute la belle saison.
Puis arrive septembre, et là, c'est la crise, à l'heure de la séparation.
 Les pieds crient au désespoir quand arrive le moment de les ranger.
Ils hurlent quand ils voient une paire de chaussettes se dérouler.
Les mots "baskets", "bottines", "escarpins" les font cauchemarder.
Sûr : le jour où je remise mes sandalettes est un des pires de l'année.

mercredi 5 septembre 2018

Regarder : entre les rives de l'Adriatique



Groupe de personnages / XIIIe s. / Musée de la ville / Split

Le sculpteur anonyme qui a su rendre de manière si touchante et réaliste
ce groupe de personnages, leurs accessoires, clef, ceinture, chaussure,
m'a rappelé le génial Maître des mois de Ferrare. 
Celui qui était si attentif aux moindres détails : visages, tendons,
mais aussi boucles, attaches, plissés, mille petits objets du quotidien.
Au début du XIIIe siècle, comment se passaient donc les échanges ? 
Quels pouvaient être les voyages entre les deux rives de cette mer 
- aujourd'hui souillée et violentée comme tant de mers -
la noble, la splendide, la prolifique et douce Adriatique ? 



Sculptures du Maître des Mois / env. 1230 / Musée de l'Oeuvre de Dôme / Ferrare


mardi 4 septembre 2018

Vivre : l'été les plages


Bateaux sur le port de Matejuska / musée ethnographique / Split / 1938


En rentrant de la plage dont on m’avait vanté les attraits et la proximité, je me suis dit qu’en une heure j’avais eu mon content de chairs boursouflées, de vociférations, de scooters pour toute une année (au moins). Je décidai qu’au fond, j’étais assez grande pour me tromper toute seule. Je regardai la carte et pointai ce lieu, où menait une seule petite route à lacets, un lieu improbable, déboulant autour d’une petite anse, à peine un demi-centimètre sur le papier, un lieu modeste, que ni TA ni aucun site de réservation ne semblait connaître, desservi trois fois par jour devais-je apprendre plus tard sur le panneau d’affichage, un lieu oublié du développement galopant de la contrée.

Le soir, sur sa grève, le soleil a pris tout son temps pour se coucher. C’était une soirée très douce, étrangement apaisée. Au bord de l’eau, trois enfants s’amusaient et riaient. Deux filles sont venues s’étendre sur leur paddle et des reflets d’or les ont bercées. Une famille polonaise s’est régalée de glaces, puis a rangé ses affaires avant de s’en aller.

Comme la nuit tombe soudainement en août ! Il y a des moments qu’on voudrait pouvoir retenir tandis qu'il nous semble être en train de rêver. Le corps garde longtemps en mémoire la sensation miraculeuse du vent, son souffle, et les chants des grillons et les aboiements lointains qui vont se fondre dans l’obscurité.

lundi 3 septembre 2018

Voyager : tout ce qu'il nous manque


Femme portant du poisson / Komiza / Vis / env.1935 / Musée ethnographique Split

Être touriste, c'est n'avoir besoin de rien. 
On arrive, on demande, on paie, on obtient. 
Voyager, dans le village d'à côté comme à l'autre bout de la  terre,
c'est être fondamentalement paumé.
Ne rien savoir, chercher à comprendre, gesticuler.
C'est dépendre. C'est être amené à reconnaître
tous les savoirs des personnes rencontrées.


dimanche 2 septembre 2018

Vivre : fin août début septembre


Portail cathédrale Saint-Laurent / Trogir



Août : curieux mois, vraiment. 
Qui commence africain et s’achève scandinave. 
Qui vous lâche la bride pour mieux vous prendre au collet.
Qui ne ménage ni ses coups de mou ni ses coups de fouet.
Le mois de tous les excès.


samedi 1 septembre 2018

Vivre : soirs d'orage





Photographie couleur d'un paysage noir et blanc / 29.08.18

Vivre ici.
Vivre ici
les orages
ennoblit la vie.