C'est une mercerie sous les arcades où on vous
prend, vraiment, au sérieux quand vous arrivez pour remplacer un petit bouton
rouge égaré ou un mètre de ruban destiné à suspendre un nounours au rétroviseur
de votre auto. On vous répondra toujours patiemment, on prendra toujours le
temps. Samedi dernier, la patronne, une minuscule Vietnamienne, avec une voix
de camionneur et un accent bernois impressionnant, nous a invités à entrer chez
ses voisins qui organisaient une brocante.
Nous l'avons suivie dans l'escalier et avons
découvert l'intérieur de ces maisons de la vieille ville étonnamment préservées
depuis l'époque médiévale. Un peu intimidés, nous avons pénétré dans un
appartement aux parois lambrissées, dont les pièces en enfilade donnaient sur
une étroite cour intérieure. Ce puits de lumière apaisant préservait son charme
d'antan. Nous avons été accueillis par un monsieur élégamment vêtu, du
crocodile aux escarpins, distingué malgré tous ses efforts pour faire
décontracté. Il devait appartenir à une famille pourvue d'une kyrielle de grand-tantes
et certaines devait avoir récemment trépassé. Manifestement, tous ces biens
hérités devenaient trop encombrants. Il avait disposé le long du corridor
jusqu'à la salle à manger une palette de belles choses. Je ne cherchais rien de
spécial, mais j'ai craqué pour ces tasses, en porcelaine, cela va de soi,
proposées à un prix de grand distributeur suédois.
Je commence à me méfier : quand je ne manque de
rien, je pousse la créativité jusqu'à m'inventer des besoins. Je préparerai
dorénavant les desserts, tiramisu et panna cotta, à même les tasses et chaque
convive fera son choix.
Je ne sais ce qui m'a le plus enchantée :
dénicher les tasses des grand-tantes ou découvrir les coulisses de cette ville
cent fois arpentée.