mardi 27 mai 2025

Vivre : déshydratations

 
Illustration du livre / ch. IX
 
« -Bonjour, dit le petit Prince.
 – Bonjour dit le marchand. »
 C’était un marchand de pilules perfectionnées qui apaisent la soif. On en avale une par semaine et l’on n’éprouve plus le besoin de boire.
 « –  Pourquoi vends-tu ça ? dit le Petit Prince.
 –  C’est une grosse économie de temps, dit le marchand. Les experts ont fait des calculs. On épargne cinquante-trois minutes par semaine.
 – Et que fait on de ces cinquante trois minutes ?
 – On en fait ce qu’on veut…
 – Moi, dit le petit Prince, si j’avais cinquante trois minutes à dépenser, je marcherais tout doucement vers une fontaine… »
Le petit prince / Antoine de Saint-Exupéry / Gallimard / éd. 1999 / ch. XXIII / p.80
 
Si la vie à la campagne semble changer vers toujours plus de densification et de spéculation, la vie des villes donne aussi des signes affirmés de modification : pleuvent les coups de klaxon, s'élèvent les doigts d'honneur, déferlent les imprécations. Dès le matin, certaines journées semblent ne tenir qu'à un fil, à une seconde, à un rien. La course contre la montre est devenue la course contre le chronomètre. Dans cette accélération constante, le manque se révèle permanent. Manque de temps, manque d'oxygène, manque d'argent, manque de rêve... On souhaiterait à certains de profiter d'un envol d'oies sauvages pour permettre leur évasion tandis qu'ils démarrent en trombe jusqu'au prochain feu de circulation.
 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire