mercredi 27 novembre 2024

Vivre : une neige qui ne veut pas céder

 
 
Il y avait une drôle d'ambiance, hier à Berne (Berne est une ville qui échappe souvent aux classifications, qui casse tous les codes, avant-hier sous la neige et par des températures négatives les ours ne s'étaient pas encore décidés à hiberner, ils attendaient sans doute que les chaussées soient enfin dégagées, mais trois jours après la déferlante glacée qui s'était abattue sur le pays et que les annonces météo avaient largement annoncée les rues continuaient d'être verglacées et les trottoirs comme les passants prenaient leur mal en patience, les premiers avec des allures soviétiques et les seconds avec des postures de patineurs néophytes). 
 
Au bord de l'Aar, il y avait toujours cet endroit où la rivière se met à chanter, comme si les ions négatifs entonnaient des couplets. C'est un point bien précis où l'on s'arrête car c'est touchant d'entendre une rivière chanter si juste son bonheur de couler. En ville, les gens paraissaient attendre Noël depuis un bout de temps. Les vitrines scintillaient joyeusement au soleil, incitaient à replonger en enfance ou à partir en vacances jusqu'à fin décembre. On était pris d'une envie de flâner, de freiner, d'arrêter le temps.

Un homme d'une quarantaine d'années, qui portait un cabas comme s'il devait se rendre au marché, se tenait penché sur une devanture et contemplait de vieilles médailles d'un air concentré. On aurait dit un gamin en train d'hésiter sur la demande qu'il allait adresser cette année. Une femme en tenue Uber Eats, assise parmi la foule, ses sacs thermiques à ses pieds, avait croisé les mains, fermé les yeux et semblait en train de prier. Quelle meilleure place qu'un banc au soleil sur une place bondée pour se tourner vers l'invisible et prier ? 

Pas un signe d'impatience. Aucune célérité. Par un incompréhensible miracle, sans cesse renouvelé, en divers carrefours les trams, les autobus, les vélos, les touristes et les enfants se croisaient sans jamais s'entrechoquer. Une nouvelle fois, la ville m'est apparue comme un petit miracle, une excentricité, un mystère qui ne se laisse pas percer et c'est pour ça que j'aime tant la fréquenter.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire