Ma généraliste a
dit : elle n’a pas coupé le cordon
ombilical. Je venais de lui raconter la délirante hospitalisation de l’avant-veille,
dans le but de faire passer une IRM à une moribonde, en pleins râles,
grabataire (comment E. avait-elle fait pour convaincre le médecin de cette
aberration ? lui imposer le trajet en ambulance, le bloc hypermoderne et
fonctionnel, de nouveaux lits, de nouvelles voix, du stress, des secousses ?).
J’avais reçu ensuite un appel en pleine nuit – réveil plutôt violent -pour m’informer
seulement que l’IRM n’avait pas pu être entreprise.
Elle n’a pas coupé le cordon ombilical. Elle ne peut pas accepter
de la laisser partir et induit le besoin d’investiguer chez les médecins.
Pour mourir en paix,
il faut que votre entourage soit apaisé et accepte de vous laisser. Depuis des
mois, E. s’agite et sa seule raison d’être est de prolonger à tout prix la vie
de sa mère.
Ici, la forêt m’a
appris le cycle des saisons et l’inéluctable vol des feuillages à l’automne,
quelques virevoltes avant d’aller tapisser la terre et la nourrir de leurs
forces épuisées.
En raccrochant dans
le noir, je me demandais comment se terminerait cette longue négation de
l’évidence : nous sommes mortels, voués à nous séparer, emportés dans la
ronde éternelle des saisons.
Coucou ma chère Dad. Je ne sais pas ce que doit faire E. pour laisser arriver jusqu'à son coeur et à son âme l'inéluctable. Mais à se débattre ainsi, elle perd de l'énergie et quand l'inéluctable arrivera, elle sera exsangue, déjà. J'espère simplement (puis-je dire simplement??) que les choses puissent s'apaiser. Je t'embrasse.
RépondreSupprimerIl y a dans les pertes d'énergies quelque chose qui relève d'un manque de sagesse, d'équilibre. Se battre contre l'inéluctable, c'est se battre aussi un peu contre soi. Un peu en retrait, j'observe impuissante et triste. Parfois il s'agit juste de lâcher-prise et d'admettre qu'on ne peut rien pour les autres, ni pour leur bonheur, ni pour leur malheur. A chacun son chemin. Bon lundi demain! D.
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