samedi 20 mai 2023

Vivre : l'herbe si verte

 

La maison, j'en avais longtemps rêvé. Une maison parfaite, avec un beau dégagement, des forêts, immergée dans une nature incontaminée. Je la recomposais à l'aide d'images et d'attributs divers : une source privée, un manteau de cheminée en pierre grise, une terrasse dominant la vallée, une échappée sur un petit lac de montagne. Elle m'attendait quelque part. J'en étais persuadée. Je ne cessais de chercher, Google map, tous les sites y passaient.
La nuit, et surtout le jour, j'en rêvais.

J'étais à la poursuite de la maison idéale et la maison idéale me poursuivait. Pas une annonce n'était censée m'échapper. Je faisais et refaisais mes calculs, la distance, les trajets, les traites annuelles et les travaux à prévoir. Je m'imaginais camper, construire, retaper, réarranger, et puis naturellement décorer.

J'imaginais un coin de monde où rien ni personne ne pourrait plus m'atteindre, où tout ne serait que luxe, calme et volupté (et réserves de bois censé me réchauffer). Je me voyais déjà en Robinson Crusoé. Ma vie allait pouvoir reprendre un nouveau départ, j'allais me réinventer. Grace à la maison, c'est sûr, je deviendrais une autre. Un feu m'habiterait.

Et puis, hier, effectuant pour la énième fois le chemin qui menait à ma petite plage secrète, suivant la route des castors et des sangliers, levant les yeux, je l'ai aperçue,  je l'ai enfin vue : la maison idéale était là, là-haut, à flanc de colline, qui m'attendait. Elle m'attend, elle se tient tranquille, fiable, accueillante, dans l'espoir patient que mes élucubrations, mes démons de minuit, veuillent bien s'apaiser.



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