lundi 1 avril 2019

Lire : hors d'atteinte


Symphonie en blanc. Portrait d'Yvette Paumier / Paul-César Helleu / Pastels / Fondation de l'Hermitage / Lausanne


Être immune, c’est vivre à l’abri des chocs, des ennuis, des souffrances, c’est être hors de portée des flèches, avoir assez de bien pour vivre sans rechercher flatterie ni réussite, ne pas être obligée d’accepter les invitations et ne pas se soucier des éloges que reçoivent les autres. Être forte, satisfaite, sentir que personne ne pense à moi et que je peux me reposer. L'immunité est un état paisible et exalté, désirable, que je pourrais atteindre bien plus souvent que je ne le fais. N'être rien, n'est-ce pas l'état le plus satisfaisant au monde ? Virginia Woolf / citée en exergue du livre V.W., Le mélange des genres, Agnès Desarthe et Geneviève Brisac, éditions de l'Olivier, 2004 

Être immune : un état qui ferait rêver. 
Mais n'est-il pas déraisonnable de le croire atteignable ?
Aspirer à l'immunité n'est-il pas signe de grande fragilité ?
 

6 commentaires:

  1. Je pense en effet qu'aspirer à l'immunité est peut-être un signe de grande fragilité. Vivre à l'abri des chocs, des ennuis, des souffrances, est-ce vraiment cela vivre ? Il ne faudrait se lier à personne, il ne faudrait pas aimer, il faudrait vivre avec une carapace sur le dos pour être sûre de ne rien ressentir, être coupée de ses émotions. Ce texte me parle car moi-même, lorsque j'étais jeune, j'ai été coupée de mes émotions. Je ne sais pas ce qui avait provoqué cet état, sans doute la mort de mon père alors que j'aurais tant eu besoin de lui. Je ne ressentais rien. On pouvait me blesser, se moquer de moi, on pouvait m'aimer, cela n'avait aucun impact sur moi. J'étais sans doute immune, mais bien malgré moi, je me protégeais ainsi, je ne voulais plus ressentir de douleur, de blessures. Heureusement que les années passant, j'ai réappris à ressentir les émotions. Et tant pis si celles-ci ne sont pas toujours joyeuses, je me sens vivante !
    Voici ce que m'a inspiré ton billet du jour, Dad. :-)
    Belle journée ensoleillée à toi.

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  2. V. W. avait une personnalité fragile, due sans doute à des deuils vécus dans son jeune âge. Due aussi à l'absence de soins adéquats liés à son époque (aujourd'hui, on la diagnostiquerait probablement bipolaire et elle trouverait de l'aide en réponse à ses besoins).
    La seule défense possible, face à un tsunami d'émotions, devait être pour elle la défense contre ses émotions, ressenties comme trop menaçantes. "se couper de ses émotions" comme tu le dis. C'est un réflexe de défense bien compréhensible. Accéder à l'intelligence émotionnelle, savoir écouter ses météos intérieures, ce sont des aptitudes dont on parle facilement aujourd'hui, qu'on prône et qu'on favorise. Heureusement. Mais selon l'époque et les milieux où l'on vit, ce n'est pas chose aisée. On peut se sentir seul, désemparé, et se défendre comme on peut contre cela.
    C'est pour cela que la divulgation de littérature appelée " de développement personnel", ou des articles dans la presse écrite, ou des émissions dans des médias sont très utiles. Ça permet aux gens de se connecter avec ces compétences et savoirs (même si parfois, dans les rayons de développement personnel, j'ai le sentiment qu'on peut trouver le meilleur et le pire et qu'il faut faire appel à tout son bon sens pour opérer).
    Entendre parler d'intelligence émotionnelle, apprendre qu'elle est indispensable pour faire face aux réalités de la vie psycho-sociale, c'est un pas en avant pour se sentir mieux vivre et être mieux avec les autres, non ?
    Par ailleurs, quand V.W. dit " avoir assez de bien pour vivre sans rechercher flatterie ni réussite", cela rejoint sa fameuse phrase " toute femme aurait besoin d'une chambre pour soi (où créer) et de suffisamment d'argent pour assurer son indépendance". Et ce point me paraît essentiel. Aujourd'hui encore.
    Merci pour ton partage, chère Françoise, qui laisse entrevoir ton parcours de vie très riche. Je te souhaite de profiter encore de ce temps magique. Belle soirée.

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  3. Je voulais écrire au milieu de ma réponse : ...tout son bon sens pour opérer un tri.

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  4. A l'époque, je pense qu'aller parler de tout cela à une psychologue m'aurait aidée grandement, et m'aurait permis de me débarrasser de ce problème bien plus rapidement. Mais à l'époque, il n'y avait que les "fous" qui allaient voir des psy... J'y suis allée bien plus tard, et cela m'a beaucoup aidée.
    En ce qui concerne la chambre, comme je travaillais chez moi, j'avais un bureau, qui est resté une pièce à moi, personne d'autre n'y vient, c'est mon coin à moi, et j'apprécie énormément ! Toute femme devrait avoir sa chambre ou son coin à elle.
    Belle fin de journée, Dad. Te lire m'enrichit et me fait du bien. :-)

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    1. On peut souligner, vraiment, notre privilège, aujourd'hui, alors qu'on a rompu avec ces tabous, ces étaux qui maintenaient les gens dans la peur et la souffrance. On accède plus facilement aux soins et à l'écoute, à la compréhension de soi et des autres.
      Ah! la chambre à soi ! homme ou femme, avoir son territoire personnel, que l'on puisse aménager, habiter selon ses vœux et besoins. Où l'on puisse se retirer, créer, rêver. La chambre à soi comme extension de son corps, comme définition de sa personnalité. La chambre à soi, si l'on a peu de moyens, peut aussi être le coin à soi, un espace même petit, que les autres respectent et qui puisse devenir "notre monde".
      Tu as raison : Les vrais échanges enrichissent et font du bien. Belle soirée (tandis que les oiseaux s'en donnent à cœur joie).

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  5. « Entendre parler d'intelligence émotionnelle, apprendre qu'elle est indispensable pour faire face aux réalités de la vie psycho-sociale, c'est un pas en avant pour se sentir mieux vivre et être mieux avec les autres, non ? »
    Oui, tout à fait, Dad.

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