Just before now / Olafur Eliasson / Nel tuo tempo / Palazzo Strozzi / Florence
Devant la billetterie, entre deux colonnes de la sobre cour rectangulaire, l'homme et ses trois camarades nous avaient hélés : voulions-nous deux entrées gratuites pour le musée ? Deux de leurs collègues étaient restés endormis après une soirée copieusement arrosée. Deux laissez-passer pour les Offices, on n'allait pas refuser. On les a chaleureusement remerciés. Un peu plus loin, nous les avons retrouvés aux portiques de sécurité. L'homme a dit : je devrais donner plus souvent. On a approuvé. Aujourd'hui, c'était lui qui nous faisait un cadeau substantiel, devenant une sorte de Père-Noël, mais qui sait ? Demain, ce serait lui qui recevrait. Le Père-Noël existe, revêt toutes sortes de panoplies, ça peut être nous, ça peut être quelqu'un d'autre, un inconnu, un étranger.
L'essentiel est de donner. L'essentiel est d'oser distribuer et d'apprendre à recevoir aussi (une sacrée difficulté, un sacré défi). Se lancer dans une ronde où il n'y aurait que des gagnants-gagnants, où l'on ne retiendrait pas nos possessions, où l'on ne serait pas des constipés de la distribution, des asséchés du cœur, crispés sur leurs avoirs, effrayés à l'idée de manquer, ceux qui tiennent une comptabilité et dont les comptes ne sont jamais équilibrés.
Plus tard, dans la journée, ce phénomène du don et du contre-don n'a cessé de se manifester. On reçoit rarement en retour de celui à qui on a donné, mais on se fait plaisir en sachant prodiguer. Il est donné de recevoir autre chose que ce qu'on a cédé. Un chien m'a prise par la manche et m'a tirée vers ses maîtres qui la faisaient. Une pièce, deux euros, des heureux. En y regardant de près, les dons ne cessent de pleuvoir : un café, une marque d'attention, un travail bien fait, un ticket de parcage, un sourire sincère.
Dans le bus, une femme s'est élancée vers le conducteur qui démarrait. Il devait s'arrêter : deux migrantes avaient oublié leur parapluie et l'orage menaçait. Elle l'a contraint à rouvrir les portes. Devant le palazzo Strozzi, une jeune mère s'est penchée sur un mendiant et lui a parlé d'un ton préoccupé. Elle insistait pour savoir comment il allait.
Donner et ne rien attendre en retour, et surtout rien d'une personne en particulier. Donner par pur élan, par simple générosité. Donner et laisser venir ce que la vie décidera de distribuer.
Merci de ce texte qui me touche. Il me fait penser à ma mère, généreuse, discrète, de tant d'attentions et pas seulement. J'ai manqué de mots, de gestes tendres ; pour compenser, j'ai reçu ses beaux exemples dont je ne la remercierai jamais assez.
RépondreSupprimerDonner et rien attendre en retour, juste la joie ressentie d'avoir souri, donné, soutenu, accompagné...
Ce que vous dites de votre mère est très touchant : il y a des exemples qui valent mille mots et sont infiniment marquants.
SupprimerOui, donner sans rien attendre en retour, car il me semble que si l'on donne avec une attente, ce n'est plus du don, on entre dans un système de troc lequel, surtout s'il n'est pas clarifié, risque fort de mener à une déception ou à un malentendu.
Avec tous mes voeux de fin d'Année.