Arezzo / 2015
Il
flotte sur la terrasse, un peu en retrait du centre ville, un air de liberté
qui frôle le négligé. C’est un lieu dit « alternatif », où
s’organisent à tour de rôle concerts et vide-greniers, où des vendeurs
ambulants se succèdent pour proposer leur nourriture exotique. Quelle que soit
la fréquentation, il y règne toujours un calme désordonné (ou un désordre
apaisé) dans des effluves de nasi-goreng et de cigarettes roulées. Entre les
tables, des moineaux affamés esquivent des bambins nu-pieds, des vieilles
connaissances s’embrassent avec cordialité, des touristes perplexes se demandent
si et comment consommer.
Cet espace invite à l’observation, à la réflexion, à la rêverie solitaire.
Mais aussi aux discussions, aux rencontres de travail, aux murmures amoureux. Certains
s’y adonnent à la prise de notes, à la rédaction, d'autres lèvent le nez, à la recherche d’inspiration.
Il y en a pour tous les goûts sur la terrasse en libre-service, au fond de la
cour de ce qui fut autrefois une école secondaire. Dire que tant de générations ont subi ici appels
à la discipline et sanctions…
Aujourd’hui,
deux jeunes s’exercent dans un coin à quelques airs de guitare, mais leur son
est si léger qu’il s’évapore en effleurant nos verres. Deux filles tentent avec
plus ou moins de bonheur de fixer des torches dans les bacs où fleurissent des
lilas et verdissent quelques rosiers. Un mec avec un grand
panier à provision s'en va à la cueillette des tasses abandonnées.
Aujourd’hui,
je pourrais passer la journée sur mon banc, à me laisser aller, regarder le soleil progresser
derrière les branches encore nues du marronnier, tirer de ma besace un calepin
et des crayons, sans savoir, sans savoir si vraiment j’aurais quelque chose à
y noter, suivre le vol d’un insecte, reluquer cette fille qui porte exactement
le blouson que je m’évertue depuis si longtemps à dénicher…
Aujourd’hui,
rien faire me paraît un art suprême, un exercice de la plus haute virtuosité,
sur la terrasse qui attend l'été…
J'aime en premier lieu ta photo: une statue un peu oubliée à côté d'une chaise recouverte d'un drapé rouge. Comme quelque chose d'intemporel.
RépondreSupprimerQuant au texte, je vois par tes yeux tous les personnages que tu décris si bien et j'aspire aussi à me poser et à observer, tranquillement, la vie qui s'écoule. Quant au blouson... mince. Il fallait demander à la fille qu'elle te le donne en échange de ta paire de chaussures par exemple. ;-) Bises alpines.