samedi 27 décembre 2025

Voyager : rien que de l'ordinaire

 
ailleurs, mais si semblable
 
 
Il y a toujours, sur le trajet de l'autoroute qui court entre Piémont et Lombardie, des étendues de champs - peut-être des rizières ou peut-être de simples cultures maraîchères - que je ne me lasse pas d'admirer. Le trajet alors pourrait durer des heures et des heures (tandis que régulièrement au-dessus de la chaussée apparaissent des tableaux lumineux indiquant aux véhicules combien de minutes seront nécessaires pour atteindre Milan, ou Asti, ou Turin). 
Cette année, c'est peu dire que la météo était "maussade" (un manière de définir le crachin, le brouillard et les nuages bas qui sévissaient depuis des jours) et pourtant, une fois encore, le paysage s'est montré sublime et disposé à se faire admirer. Les brumes atténuaient les contours des bâtisses et des bosquets. Elles pastellisaient les couleurs des étendues en jaune pâle, en ocre, en  beige et en blanc cassé. C'était des paysages qui n'avaient peut-être rien de remarquable, mais que j'avais un grand plaisir à observer. Ces paysages incarnaient tout simplement la Beauté. On aurait pu croire qu'un Rothko les avait appliqués à larges traits. On aurait aussi pu les imaginer esquissés par Iroshige. J'aimais tendrement la manière dont les arbres se dessinaient en gris pâle sur de longues bandes délimitant les diverses parcelles. J'aimais les observer, tous pareils, et tous différents, alignés en bordure de propriété.
C'était d'une grâce hallucinante et j'avais la chance, n'étant pas conductrice, de pouvoir les admirer (étant donné la vitesse, et les encadrements des portières, il n'est jamais question pour moi de les photographier). C'est peut-être ce qui en fait la valeur particulière. Il y a comme ça des voyages dans les voyages, des moments qui échappent aux définitions, aux impératifs, aux découvertes annoncées. J'ignore encore à ce jour le nom et le lieu précis de ces contrées. J'imagine qu'il n'y a que depuis l'autoroute qu'on peut les voir avec le recul nécessaire. Certains jours, je me dis que je serais  prête à rouler pendant des heures, rien que pour les redécouvrir.
 
 

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