vendredi 3 mars 2017

Lire : les abeilles, la maison et la paix retrouvée


Bordeaux / Cour Mably / 2016

A Bordeaux, je désirais obstinément photographier la délicate relation entre le ciel et la pierre tendrement beige. Les longues bandes d’immeubles pâles et classieux, surtout celles en front de Garonne, forment un doux paysage urbain qui me fait rêver. Mais j’ai dû renvoyer ce projet à un prochain séjour : les rafales, les ondées et les averses finissaient immanquablement par nous ramener dans les musées et les librairies.

Chez Mollat, le choix était renversant. R. se montrait stimulé par toutes ces propositions et voulait emporter la moitié du magasin. Quant à moi, je subissais l’effet saoulant de toutes ces couvertures aguicheuses et de leurs quatrièmes aux contenus très divers. Au bout d’un certain temps j’étais comme prise de vertige. J’ai toujours pensé que trop de livres tuent le livre et  préféré une petite librairie présentant des choix avisés aux grands salons où je me perds et ne sais plus où donner de la tête. Au final, je me suis décidée pour trois ouvrages.

Foutez-vous la paix de Fabrice Midal, que je destine à ZB pour son anniversaire. En ce moment, impossible d’éviter le message : on le retrouve sujet de bon nombre d’articles et en bonne place dans bien des devantures. Mais j’apprécie F. Midal depuis de nombreuses années et je crois que cette lecture pourra offrir quelques ouvertures à ZB, toujours perfectionniste, désireux de donner le meilleur de lui-même et… qui doit faire face aux fortes exigences de son travail.

Une année à la campagne, de Sue Hubbell (NRF, 1988) est un livre que j’avais emprunté il y a au moins… vingt-cinq ans et que je n’avais jamais oublié. Je l’ai retrouvé réédité chez Folio. Il y a des livres comme ça. On les lit, ils restent gravés dans notre mémoire. On en garde comme un regret, avec au fond de soi le souvenir de quelques passages, de quelques anecdotes. On se dit qu’on aimerait les retrouver, sans plus se rappeler du titre, ni de l’auteur. (A l’inverse, il y a ceux qu’on oublie instantanément après les avoir quittés, qui nous ont si peu marqués qu’on peut les racheter quelque temps après sans se douter qu’on les a déjà lus, des livres pas forcément mauvais, ni mal écrits, seulement des livres qui ne nous parlent pas et auxquels notre mémoire est imperméable). Ce bouquin-ci, c’est l’histoire d’une biologiste qui a quitté un jour la ville, pour devenir apicultrice dans les monts Ozarks, au sud du Missouri. S’étant séparée de son époux, elle raconte au fil des saisons sa vie solitaire mais non isolée : on la voit, dure à la tâche, se lier aux habitants rudes de ces régions, réparer son vieux pick up cuvée 1954, désensibiliser son futur aide aux piqûres d’abeilles. C’est un livre didactique, savant et divertissant tout à la fois. Je me réjouis de relire cette femme de caractère, à l’écriture colorée et efficace.

Enfin, j’ai déniché Chez soi. Une odyssée de l’espace domestique, de Mona Chollet, journaliste au Monde diplomatique. Je cherchais depuis longtemps un livre comme celui-ci, bien écrit, sans être pédant, qui ne soit pas une étude sur l’habitat, mais qui traite de l’habitat vécu. Le livre de M. Chollet développe des idées originales et déconstruit pas mal de préjugés sur notre manière de vivre dans nos maisons. Elle valorise « la sagesse des casaniers », remodèle notre vision de la cohabitation, ainsi que du travail domestique (l'auteure lui rend ses lettres de noblesse en le définissant comme un indispensable déblayage qui nous concerne tous, hommes ou femmes . « L’esprit se désencombre, l’énergie se renouvelle, l’horizon se dégage »). Le livre s'achève par un chapitre sur l'habitat idéal. De quoi stimuler l'imaginaire.. 

La météo, si peu clémente à Bordeaux, peut maintenant venir faire des ravages dans ma région. Je bloque d'ores et déjà des plages de lecture, allongée dans ma méridienne et prête à faire main basse sur les derniers cannelés.

3 commentaires:

  1. Ah je connais cela. Aller dans une belle ville et finalement passer son temps à l'intérieur car il fait trop mauvais. J'ai vécu cela l'année dernière à Edimbourg. Et je comprends aussi que les vastes librairies deviennent un peu insupportables. Tout le monde lit la même chose et on se prend à suivre les modes sans plus vraiment réfléchir à ce qu'on cherche vraiment dans la lecture.
    Dans ton choix, je prends le premier. Je crois que j'ai bien besoin de me foutre la paix!
    Et en échange de bons procédés, je te suggère " Ecoutez nos défaites" de Laurent Gaudé. Très belle écriture.
    Bises alpines et belle fin de semaine.

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  2. Oui, je n'ai pas lu "Ecoutez nos défaites", mais R. l'a commandé et vient de le finir. L'a trouvé bien. Je ne sais pas pourquoi, mais R. et moi, qui avons tant de goûts en commun, ne partageons jamais les mêmes lectures. On fait livres à part depuis toujours. En trente ans, il n'y a que la série Millenium qui a réussi à nous réunir, c'est dire! Très bon vendredi à toi, Dédé! D.

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  3. La météo, si peu clémente à Bordeaux ?
    Mince, j'espère que ça s'arrangera au week-end de Pâques ...
    Parce que toute la famille s'y retrouve.
    ¸¸.•*¨*• ☆

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