mardi 24 décembre 2024

Vivre : Rilke dans la ville

 

 
Noël est le jour le plus calme de l'année, Tu peux entendre tous les cœurs aller et battre comme des horloges qui indiquent les heures du soir  écrivait Rilke il y a plus d'un siècle. Hier la ville était belle sous le soleil, belle et remplie de gens qui se pressaient, sans se blesser, se réjouissaient, sans se bousculer. Des passants marchaient, se dirigeaient vers leurs maisons ou les maisons de ceux qui les attendaient. Ils portaient des sacs et on se demandait ce que ces sacs contenaient, de quoi ils étaient chargés, lesquels étaient lourds et lesquels étaient légers. Il y avait une multitude de visages, dont les lèvres se mouvaient, les yeux se plissaient. Parfois sur un visage la gravité ou la conscience d'une solitude s'affichait. Le mendiant  assis sous un porche protégeait son chat sous une couverture mitée. Une femme longue et maigre avec un enfant très maigre avait tiré d'un coup exaspéré la laisse de son chien aussi maigre qu'elle et son enfant et ils se dirigeaient à pas saccadés vers un quai impatient de les voir arriver. Certains portaient des habits tout neufs avec fierté, et certains autres marchaient dans des souliers usés. Sous des bâches blanches, les maraîchers vendaient leurs légumes, toujours les mêmes légumes, avec sérénité, hors de question de ne pas prendre tout le temps nécessaire pour échanger. Hier, la ville était belle, remplie de tous ces gens vivants qui vivaient, un samedi presque pareil à tous les samedis, mais c'était avéré : on pouvait entendre les cœurs battre comme des horloges tandis que midi sonnait.
 
 

Weihnachten ist der stillste Tag im Jahr,
da hörst Du alle Herzen gehn und schlagen
wie Uhren, welche Abendstunden sagen:
Weihnachten ist der stillste Tag im Jahr,
da werden alle Kinderaugen groß,
als ob die Dinge wüchsen die sie schauen,
und mütterlicher werden alle Frauen
und alle Kinderaugen werden groß.


Da mußt du draußen gehn im weiten Land
willst du die Weihnacht sehn, die unversehrte
als ob dein Sinn der Städte nie begehrte,
so mußt du draußen gehn im weiten Land.
Dort dämmern große Himmel über dir
die auf entfernten weißen Wäldern ruhen,
die Wege wachsen unter deinen Schuhen
und große Himmel dämmern über dir.
Und in den großen Himmeln steht ein Stern
ganz aufgeblüht zu selten großer Helle,
die Fernen nähern sich wie eine Welle
und in den großen Himmeln steht ein Stern.

Für Clara Rilke, Weihnachten, 1901
(in : Weihnachten naht, Rainer Maria Rilke, Suhrkamp-Insel, Berlin, 09.2024 / précédemment : Insel, Berlin, 1902)
 
 
Noël est le jour le plus calme de l'année, 
Tu peux entendre tous les cœurs aller et battre
comme des horloges qui indiquent les heures du soir :
Noël est le jour le plus calme de l'année, 
les yeux de tous les enfants grandissent,
comme si les choses qu'ils regardent grandissaient,
et toutes les femmes deviennent plus maternelles
et les yeux de tous les enfants grandissent.

Tu dois t'élancer dans la vaste campagne
où tu verras Noël, demeuré intact
comme si ton esprit n'avait jamais désiré les villes,
alors tu devras t'élancer dans la vaste campagne.
Il y a un ciel immense qui s'élève au-dessus de toi
qui repose sur des forêts blanches lointaines,
les chemins s'étendent sous tes pas
et un ciel immense se lève au-dessus de toi.
Et dans le ciel immense il y a une étoile
pleinement épanouie avec une luminosité rare,
ce qui est éloigné se rapproche comme une vague
et dans le ciel immense se tient une étoile. 
(traduction personnelle et très approximative)

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