Maylis de Kerangal est
historienne (option cartographie), philosophe, ethnologue de formation.
Ses
livres offrent des focus originaux sur une réalité précise.
Qu’il s’agisse
de la construction d'un pont ou d’une transplantation cardiaque,
elle élabore ses
livres en multipliant les points de vue sur le processus exposé.
Fascinant de l’écouter : l’idée
du « nid » d’œuvres dans lequel elle crée son propre livre m’a
laissée bouche bée.
"Moi, je n’ai pas du tout une idée d’autoconstruction. J’ai une position qui est à front renversé avec cette position-là. Je n’ai pu écrire moi-même que parce que j’ai lu. Et aujourd’hui je vois bien que si je ne lis pas et que je ne suis pas portée par des livres qui m’enthousiasment, et par des écritures aussi, pas seulement par des sujets, mais aussi par des langues, j’écris moins, j’écris pas.Et un des premiers mouvements quand je commence à revenir vers l’idée d’écrire un livre, c’est d’en rassembler [des livres]. Je fais une espèce de collection à partir de ma bibliothèque, qui n’est pas énorme, mais qui est quand même assez riche…Et je ne cherche pas à rassembler des livres qui vont évoquer le sujet qui m’intéresse, mais dès lors que moi, je vais tisser des échos entre ces livres que je rassemble, j’ai le sentiment que je suis déjà en train d’écrire mon propre livre.
Cette collection, qui précède le moment de l’écriture, la rassembler c’est me placer dans le désir de ce livre à venir. Cette collection n’est pas si importante, c’est une quinzaine de livres. Cette liste va rester stable. Et ça agglomère des textes qui sont pour le coup des textes de nature, de langues extrêmement différentes : un atlas, des textes très documentaires, des essais, de la poésie. Il ne s’agit pas d’aller capter des éléments que l’on va faire exister dans la narration.
C’est comme se préparer une espèce de nid, de faire son nid dans d’autres livres que le sien, un nid de désir, très inspirant.Et quand cette collection se met en place, je sens que le livre vient, je suis en train de construire une sorte d’habitation pour ce roman. Et quand je me déplace, il faut naturellement que je les emmène avec moi."
Les Masterclasses / 17.07.2017
La naissance d’un pont //
Réparer les vivants // Publiés aux éditions Verticales
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