lundi 18 février 2019

Lire : likes et autres addictions





Sebastien Bohler est docteur en neurosciences et rédacteur en chef du magazine "Cerveau & Psycho". Il vient de sortir ce livre fascinant : "Le bug humain. Pourquoi notre cerveau nous pousse à détruire la planète et comment l’en empêcher".

Invité vendredi dernier à l'émission "28 minutes", il constate que l'humanité court à sa perte et en recherche les causes. Il a été ainsi amené à s'intéresser au striatum (zone du cerveau qui produit la dopamine). Il relève par exemple, l'incohérence dans laquelle nous vivons :

"On est capable d'entendre un jour aux informations : "c'est une catastrophe. Les océans vont monter de deux mètres d'ici 2100. On ne va pas tenir les objectifs pris à Paris en 2015." Et quelques minutes plus tard : "40 milliards de contrats de longs courriers. Fantastique nouvelle." C'est contradictoire.

On sera peut-être une espèce qui va s'autodétruire. Il y a quelque chose qui ne marche pas dans notre cerveau. Alors qu'il est si intelligent, il n'est pas capable de prendre des décisions qui sont capables de lui sauver la mise.

Nos désirs fondamentaux ne sont pas nombreux. Ils sont pilotés par ce centre, le striatum, qui ne diffère pas beaucoup de celui d'un primate.

Le striatum va nous donner du plaisir, sous forme de décharges de dopamine, à chaque fois qu'on va cumuler soit de la nourriture, soit du sexe, soit de l'information, soit du statut social. Les likes, par exemple. On voit que le striatum s'allume à force de recevoir des likes et qu'il tombe en panne quand on n'en a pas assez. C'est une force irrépressible qui nous fait courir après ça, qui nous pousse à tous les excès. Ça peut même mener à de l'addiction. Le problème, c'est que ça fait fonctionner toute une industrie. Le poids du numérique aujourd'hui, c'est quasiment l'équivalent du transport aérien en impact carbone.

Il faut utiliser le striatum pour autre chose. On s'est mis dans un piège, il y a environ un siècle, quand on a mis en place un système économique et financier qui épouse ces désirs fondamentaux du striatum, au lieu de les équilibrer. Tout notre système tend à valoriser la compétition, alors qu'il faudrait produire de la dopamine pour autre chose. Il faut donner du statut social non pas à ceux qui accumulent des voitures suréquipées, ou des smartphones dernière génération, mais plutôt à ceux qui font des gestes pour la planète, vivent sobrement, se comportent de manière altruiste."

Un autre éclairage sur nos comportements humains. Une approche innovante pour envisager de réelles solutions, pour se doper hors compétition et hyperconsommation. Une vision où le courage de Greta Thunberg et autres jeunes héros quotidiens serait valorisé (et pas sanctionné comme a pu l'apprendre). Une direction vers d'autres valeurs. On peut rêver (en tentant d'impacter).


9 commentaires:

  1. Coucou Dad. Le constat de ce monsieur est vraiment alarmant. Il ne fait que confirmer ce que l'on soupçonne déjà. Notre manière de consommer n'est pas bonne ni pour nous, ni pour la planète. Quant aux élèves qui font grève... pourquoi faire grève de l'école alors qu'elle est là justement pour donner des outils et des savoirs qui pourraient permettre aux élèves et étudiants de se battre mieux armés par la suite? Ce n'est que mon avis mais je trouve que faire grève de l'éducation n'est pas une bonne idée. Descendre dans la rue pour dénoncer certaines choses oui.
    Bises de plaine et belle après-midi ensoleillée.

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  2. Oui. L'école est là (ou devrait être là) pour donner des outils et des savoirs aptes à se sentir mieux armés dans la vie. Est-elle là pour rendre plus conscients des enjeux climatiques et des enjeux de la consommation ? Rien de moins sûr. Le taux d'instruction dans nos sociétés occidentales n'a jamais été aussi élevé (accès aux études supérieures, aux diplômes, à l'alphabétisation) et pourtant elles connaissent des taux de pollution alarmants.
    Bien sûr, que si l'on voulait être strictement légaliste, on interdirait les grèves et les manifestations non autorisées. Mais n'est-ce pas en sortant (un peu) des clous que les évolutions sociales se sont faites ? Pour se faire entendre, étant en démocratie, les gilets jaunes devraient-ils en référer uniquement à leurs syndicats et à leurs députés ? Certaines femmes, pour obtenir leur droit de vote, sont passées par la case "grève du travail ménager". Auraient-elles dû rester aussi sages qu'on le leur intimait?
    Cela dit, ce mouvement ne doit évidemment pas être un encouragement pour les cancres à sécher les cours. Mais, pour l'instant, cette manière d'agir a peut-être plus d'impact qu'une manifestation un samedi après-midi, puisqu'on en parle davantage. Qui sait ? Très belle aprem, ma chère Dédé!

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    1. ou alors utiliser l'école pour faire passer le message...?

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  3. Est-ce que tu parles du message pro climat auprès de jeunes ou du livre de S. Bohler ?
    Si j'ai bien compris S. Bohler, la question n'est pas tant de faire passer un message, car tout le monde est d'accord (à part quelques décérébrés) pour affirmer que nous abusons des ressources de la planète. La question est de pouvoir débugger le bug de notre cerveau, à savoir ce mécanisme infernal qui pousse notre cerveau à vouloir toujours plus (nourriture, plaisir, possessions, likes, etc). Le fait qu'on n'est jamais rassasié. Le fait qu'on ne comprenne pas qu'assez c'est assez. Le fait qu'on valorise ceux qui possèdent et qu'on ne revalorise pas ceux qui partagent. C'est une question de neuroscience qui rejoint des notions morales. En cela, le bouquin paraît intéressant et je me réjouis de le lire.
    Je te souhaite une belle fin de journée, chère Dédé. Il fait si beau, ce pré-printemps est une merveille.
    PS : as-tu eu des retours depuis mercredi ? je veux dire : des personnes qui ont assisté ?

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  4. Je pensais que ces jeunes pouvaient utiliser faire passer leurs messages dans leurs établissements scolaires et bosser sur cette problématique du climat par exemple dans leurs cours de géo, biologie ou physique. Tout en manifestant à l'extérieur de l'établissement. Enfin, c'est un avis parmi tant d'autres.
    Quant au livre, il a vraiment l'air passionnant et je vais noter la référence. Merci Dad de nous faire réfléchir! Quant à ce pré-printemps, la montagnarde que je suis le déplore un peu... La pauvre nature ne sait plus à quel saint se vouer. Mais il faut profiter des rayons de soleil.

    Quant aux assurés. j'ai fait remplir une évaluation à la fin du cours et les avis allaient de "excellent" à "bon". Sauf une personne qui n'a rien compris et qui m'a fait mis une mauvaise évaluation. ;-)
    Bisous!

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  5. Merci à toi, chère Dédé, de savoir si bien saisir les balles au bond. Je te souhaite une très belle et très douce soirée. Suis ravie pour les évaluations reçues. Quant à la dernière personne ... elle provenait peut-être d'un autre système scolaire, avec évaluations inversées. En fait, elle voulait dire que tu étais parfaite, elle t'a mis un F pour... Fabuleux!

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  6. Un livre sûrement passionnant que je vais m'empresser d'acheter. De lire que nous créons nous-mêmes ce bug de ne jamais être rassasiés me parle très fort. Peut-être que lire le livre doit déjà aider à être moins accro à ce besoin ? Je le lirai et je sais déjà à qui je vais l'offrir.
    Je suis abonnée à cette revue "Cerveau & psycho" dont tu parles, elle est passionnante.
    Bonne soirée, Dad.

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  7. Si tu veux écouter S. Bohler, tu le trouveras avec le lien de l'émission 28'. Il y parle d'une expérience intéressante sur les bienfaits du don. On y remet une somme d'argent à des gens qui peuvent en faire ce qu'ils veulent. Et les femmes, qu'on a éduquées à plus d'attention à l'autre, donnent plus qu'elles n'en gardent pour elles. Ce faisant, elles produisent autant de dopamine que ceux qui gardent tout l'argent pour se faire plaisir. Intéressant, non ?

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    1. Oui, intéressant et révélateur, cela ne m'étonne pas. Merci Dad.

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