mardi 4 août 2020

Voyager : des oliviers et des hommes


Dans cette terre bénie des dieux, où tout paraissait naître pour combler les humains, nous avons découvert un cochon heureux - véritablement heureux - de vivre sa vie de cochon, et qui tournoyait dans son jardin, nous avons goûté à des plats généreux au fond de trattorie où s'activaient des équipes jeunes et motivées, nous avons rencontré trois héros pas vraiment ordinaires, entraînés aux avalanches et aux tremblements de terre, qui avaient déjà plusieurs sauvetages à leur actif, trois malinois belges de toute beauté.
C'était un coin où les gens s'activent sans se la péter, se donnent sans la ramener. Il faisait bon y fréquenter toutes sortes de marchés (et on ne s'en est pas privés).
Le deuxième jour, l'homme a simplement dit : Il y a des années comme ça. Parmi tous les produits qu'il proposait, nous étions particulièrement intéressés par son huile, splendide. Tandis qu'il nous présentait son précieux or vert, une merveille de douceur, il nous a raconté que l'année précédente un gel printanier avait détruit toute la floraison de ses oliviers. Une mesure pour rien, une année qui n'avait rien donné. 
Les leçons de vie se transmettent au travers de phrases toutes simples. Dans l'attitude de l'homme face à l'adversité, il n'y avait aucune résignation, aucune passivité. Il y avait seulement la conscience de devoir prendre ce qui vient et de continuer. Sans se lamenter, sans revendiquer. Juste : assumer, avancer et, naturellement, travailler. Nous lui avons acheté quelques merveilles : du miel couleur blé mûr, de larges biscuits de maïs, des galettes de riz avec au centre un joli sceau estampillé, plus une bière dantesque. Nous étions trop heureux de le soutenir en nous faisant plaisir et en nous réjouissant de réjouir ceux à qui ces victuailles étaient destinées.
Oui : Il y a des années comme ça. Des années où tout se ralentit, tout se ferme, tout se suspend. Des années où l'arc monumental d'une ville idéale s'illumine chaque soir à nuit tombée. L'arc, érigé en 1647 pour marquer la fin d'une terrible peste, affiche aujourd'hui en couleurs la conviction que tutto andrà bene. Tout ira bien. Il y a des années comme ça. Tout finira par s'arranger. Alors que tant de voyants clignotent en rouge, il s'agit d'y croire, en vert et contre tout.



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