Ce soir-là, ce printemps-là, j'avais pris plusieurs photographies de la lumière jouant avec les vitraux sur les dalles de l'église, à Cairanne. Je sais que j'en ai posté déjà quelques unes ici, mais je ne m'en lasse pas. Ces derniers temps, la répétition des choses me fascine et m'enchante tout à la fois. J'aspire à relire, à revoir, à réentendre, à retrouver. J'ai besoin de tourner en boucle autour de mon passé. Les nouveautés m'ennuient. Les modes m'horripilent. J'aime. J'aimerai. Je ne me lasserai jamais de ce que j'ai aimé. Si les airs sont toujours les mêmes, les variations - subtiles - viennent m'enseigner que rien - rien - ne saurait jamais se répéter entre changement et continuité.
Tourner autour de son passé. Le revisiter, essayer de comprendre certaines décisions prises, certaines orientations... avait-on le choix ? L’envie de retrouver une atmosphère, une impression, un sentiment de bienêtre que l’on regrette. Mais la relecture, la redécouverte de livres aimés peut aussi casser un enchantement, presque un mythe, de même que d'essayer de retourner sur des lieux aimés ou chargé d’histoire, non ? J’ai toujours voulu retourner dans le restaurant chinois du Quartier Latin, dans lequel j’avais gouté pour la première fois un repas chinois, quelques années plus tard, quel désenchantement. Non seulement le restaurant avait changé – bien que je n’en sois pas sûr – mais moi aussi, et là j’en suis sûr, et l’enchantement a disparu, l'enchantement de la découverte, des odeurs, des goûts et saveurs. Par contre, je pourrais retourner pour la dixième ou vingtième fois aux Offices de Florences et jamais je ne me lasserai d’admirer les œuvres exposées, je retrouve toujours cette sensation de plénitude, même si je les connais bien : cet enchantement se renouvelle sans cesse et continue à me nourrir.
RépondreSupprimerQue faut-il en retenir ? Le passé peut alimenter le présent, mieux le comprendre peut permettre de ne pas ressassé toujours et toujours la même chose afin de repartir vers de nouvelles découvertes, vers de nouveaux territoires. Certains souvenirs restent vivaces et à la longue font partie de notre socle, sur lequel nous pouvons nous appuyer. Mais de tourner autour de son passé ne devrait pas devenir un but en soi, c’est surtout valable pour les souvenirs lourds à porter, ceux qui ne vous font pas voler, les : j’aurais dû… qui ne font que de nous enfoncer.
Gaspard
Il m'est aussi arrivé d'hésiter à retourner dans les lieux où j'avais connu des expériences heureuses par superstition, par peur de la déception. Et puis, j'en suis revenue, car vivre, c'est risquer. Bien sûr ce ne sera pas "comme la première fois" mais si on ne prend pas le risque, alors on risque de passer à côté d'une nouvelle expérience qui pourra être belle, elle aussi, même si différente. On ne peut pas dupliquer le passé. On ne peut jamais avoir toutes les garanties. Le restau chinois parisien et le musée florentin, ce sont les deux extrêmes de ce que l'on peut trouver, en retournant. Et c'est bien, à mon avis, qu'il en soit ainsi, que tout ne soit pas assuré, balisé.
SupprimerQuant à tourner autour de son passé, il ne s'agit bien évidemment pas de ressasser, ou de ruminer. Il s'agit de retrouver ce qu'on a aimé pour se l'approprier une nouvelle fois (parce que la mémoire ne peut pas toujours tout garder dans son disque dur). Et aussi peut-être : retourner à son passé permet d'éviter cette fuite en avant propre à notre époque : toujours quelque chose de nouveau, de "NEW" comme l'affichent les magasins, la dernière technologie, les rentrées littéraires, les dernières sorties. ça permet de raccrocher tous les wagons de la mémoire. Pas de femeture au présent, bien sûr, pas de passéisme non plus. Juste l'idée de se rassembler.
Belle soirée, Gaspard.
PS : quant à la question du choix que vous posez au début... je la définirais comme une orientation vers la meilleure solution qui apparaît. Je crois de plus en plus qu'on fait toujours ce qu'on peut, du mieux qu'on peut, toujours, et les options que l'on a prises tout au long de sa vie en font partie.