Le pain droit sorti du four. Symbole de l'essentiel. Manger à ma faim : je n'ai jamais pu me sentir blasée devant ce privilège. Société de surconsommation ou pas, pouvoir entrer dans un magasin, y trouver de la nourriture et être en mesure de l'acheter m'a toujours paru relever d'une chance inouïe. Un vieux fantasme (sans doute hérité d'une misère atavique, fichée dans mes gênes.)
C'est donc naturellement, ces derniers jours, que je me suis mise à cuisiner à heure fixe, en guise de rituel et d'activité créatrice. Réaliser de nouvelles recettes, inventer des festins avec trois fois rien, jouer, pétrir, décorer. La félicité se poursuit durant le partage émerveillé et quasiment cérémonieux des repas. Malgré leur extrême simplicité (non dépourvue d'élégance), étonnant, comme ils me mettent en joie. Ici, aucun reste, rien ne se perd. Ce qui ne peut pas se consommer se donne au chien, ou aux oiseaux, ou au renard. Ou retourne simplement à la terre. Plus que jamais, manger est un moment fort, grave et jubilatoire, un pur moment de bonheur.
Manger à sa fin. Quel extraordinaire privilège que celui de nos générations occidentales. Celles et ceux qui n'ont pas connu de privation, si ce n'est peut-être dans la petite enfance des baby-boomers. Ma mère racontait que sa sœur ramenait chaque semaine des légumes de la campagne. Au moins 15 km à pied, mais le vélo à la main avec deux gros sacs posés dessus, chargés de provision, de légumes, de pommes de terre, de beurre, et un ou deux poulets, etc. quel courage et quelle force !
RépondreSupprimerPour ma part les plaisirs de la table se sont réduits à un essentiel. J'ai un régime strict pour ne pas prendre de poids, à cause de l'immobilité, tout en étant suffisamment protéiné. Je suis habitué, cela fait plusieurs années. Finalement j'aurais pu être moine ! ! ;-)
Ce régime autorise « des écarts », mais au fil du temps je n'en ai guère plus ni le besoin, ni le désir. Extraordinaire adaptabilité du corps. Cela n'empêche nullement de faire la fête ! Sauf si la fête consisterait à se remplir la panse jusqu'à ce que baignent les dents du fond… ni d'aller au restaurant. Et là, je suis de plus en plus étonné de voir, aux tables d'à côté, les quantités industrielles de bouffe qu'ingurgitent les gens en une heure de temps et parfois moins ! M'obliger à cela serait une torture…
Reste que mon entourage me considère toujours comme « bon vivant » !
Ce que tu écris sur ta mère me touche. Nos parents nous ont raconté et on n'oublie pas.
RépondreSupprimerOn peut être gourmet, bon-vivant sans bâfrer. Pour savourer, est-il besoin de grosses quantités ? Je fais partie des gourmands avec un IMC correct et ça me va (pas besoin de faire régulièrement un régime pour perdre après avoir trop avalé, pas besoin de conseils minceur, de sport anti-calories, de produits allégés, de crèmes ultra-chères censées faire fondre les bourrelets). J'adore ton lapsus : "manger à sa fin". C'est peut-être ce qui se passe quand on engloutit plus de sucres, de calories et de lipides que nécessaire. Nous pourrions passer des quantités industrielles aux quantités artisanales (des aliments frais, produits avec amour par des gens de métier).J'ai écrit ce billet, parce que je trouve que la nourriture est un délice (aller sur les marchés, cuisiner, inventer, déguster). Mais peut-être que nous avons oublié que ce que nous considérons pour acquis : avoir un toit, accéder à de l'eau, pouvoir se nourrir et nourrir nos enfants, sont des privilèges que bcp de gens n'ont pas. Être conscients de ses privilèges, est-ce déjà un pas pour ne pas en abuser ? Belle après-midi.
SupprimerEn évoquant les excès alimentaires, je ne pensais pas à toi, bien entendu. Je ne sais pourquoi, mais je ne t'imagine pas en surpoids ! Je ne le suis pas non plus. J'ai fait un régime alimentaire, au départ, pour perdre quelques kilos cependant, parce que je risquais d'en prendre lorsque le fauteuil roulant est devenu indispensable. Aujourd'hui je ne parle plus de régime. Simplement d'un mode alimentaire qui me plaît me convient.
Je pensais à la malbouffe à laquelle malheureusement sont astreints bien souvent les plus démunis, pour qui des produits frais ordinaires sont déjà un luxe.
Je partage ce que tu dis concernant la cuisine que l'on peut faire soi-même. Mon épouse cuisine très bien, sans que ce soit une passion culinaire. Et je n'ai pas le souvenir de plats cuisinés industriels à la maison. Juste parfois des trucs du traiteur du quartier mais qui fleurent bon la cuisine artisanale si on peut dire.
Alors oui il me semble que nous sommes des privilégiés. On ne va pas se flageller pour autant. Et puis on ne refait pas son éducation : « ne pas gaspiller ne pas être outrancier, penser à ceux qui ont faim » on m'a inculqué des choses de ce genre. Je n'ai jamais regretté. D'ailleurs je devrais plutôt écrire : on a « fait naître en moi » des choses de ce genre. Parce que j'ai toujours estimé que c'était juste.
Et pour ce soir : bon appétit ! ;-)
Ah merci!!! Ton comm' arrive à point :je m'apprête à faire des lasagnes ce soir. Description : sauce tomate maison, avec carottes, oignons et céleri intégrés // viande de provenance toute proche // pâtes artisanales (mais il arrive d'en faire ici) // parmesan râpé à mesure // et béchamel avec un peu de bouillon bio.
SupprimerLa malbouffe est une calamité. J'aimerais pouvoir mettre sur pied des ateliers cuisine bon marché. Avec une amie diététicienne nous avions vu qu'on pouvait faire manger équilibré et goûteux une famille de 4 personnes avec un tout petit budget. Le problème, c'est que cuisiner sain, c'est comme la lecture, c'est un héritage culturel et nous ne sommes pas égaux face à ce savoir. Même si les médiatiques sont gratuites, nous sentons-nous tous libres également d'y entrer ? Un sachet de chips coûte plus cher qu'un plat de pâtes avec sauce traditionnelle. Il y a des recettes populaires riches, savoureuses et qui ne coûtent rien. Seulement, tant de gens sont coupés de leurs racines...
Bon, je ne vais pas entamer un cours, même si le sujet est passionnant : il faut que je me dirige vers la cuisine. Belle et douce soirée. Et bon appétit à toi aussi!