Tout le long de la route, les Alpes nous ont accompagnés. Par moments, fantomatiques présences émergeant du brouillard et finissant par louvoyer dans un ciel de cendre, griffes happées par le néant. Par moments, partitions esquissées à l'infini, délicates dentelles de l'horizon, exquises harmonies. A l'aller comme au retour, fils d'Ariane ou filles de l'air, sous un ciel lacté ou tempétueux, toujours présentes pour indiquer le Sud, ou ne pas perdre le Nord.
Entre deux, il y eut Giotto, Giusto et Altichiero. Il y eut des trombes féroces et un arc-en-ciel candide qui laissa la moitié de la ville bouche bée. Il y eut cette artisane sur le marché qui déclamait à tue-tête "La morosité ne passera pas : nous avons de la grappa !". Il y eut des guides opiniâtres : celui qui ne quittait pas des yeux mon Canon banni, celui qui tint à me faire savoir preuves à l'appui que d'infâmes plagiaires osaient sévir à la Renaissance déjà, celui qui me fournit un bulletin météo précis sur les calamités survenues en Ligurie et celles qui ne manqueraient pas de nous débouler dessus dès l'après-midi .
Et des repas à l'incontournable Pago pago, toujours aussi kitsch, toujours aussi bruyant, toujours aussi accueillant et généreux avec ses nombreuses familles d'habitués, servant de divines pizzas et une non moins divine pasta. Et le marché historique Sotto il Salone, ses stands de victuailles à se damner, où P. fut nourri, félicité, caressé par une multitude de grands-mamans attendries (à tel point que je n'osais ensuite le laisser seul devant un magasin de crainte qu'on me le vole). Il y eut l'accueillante librairie Pangea où l'on ne manque jamais de dénicher quelques pépites et qui distille toujours en sourdine de belles musiques ethniques.
Et les petits déjeuners chics au caffè storico Pedrocchi. Et, sous des bâches gorgées d'eau, la mauvaise humeur de vendeurs que la météo lunatique ne portait pas à faire des affaires. Et les verres de Campari, dans l'obscurité saturée de lumières (ainsi que l'étrange phénomène qui me permettait de m'orienter sans problème de l'appartement jusqu'à la terrasse bénie et m'empêchait de repérer plus tard le même chemin pour regagner mon lit).
Il y eut des chants, des chansons, des chorales, des sérénades dans la nuit. Il y eut des étudiants délivrés, des musiciens et des mendiants. Et il y eut aussi cet homme, au visage émacié, assis dans un coin, digne, trempé, qui a décliné sobrement notre offre d'un café.
Il y a eu des lévriers vêtus de manteaux Burberry double-face, des toutous qui tenaient dans un sac, des énormes clébards prêts à l'attaque que leurs maîtres devaient retenir fermement au collier (et qui ont laissé P. pensif : ces chiens n'étaient vraiment pas sa tasse de thé). Et finalement, il y a eu Zeus : trois mois et trente centimètres au garrot, craquant et farceur labrador marron.
Et des repas à l'incontournable Pago pago, toujours aussi kitsch, toujours aussi bruyant, toujours aussi accueillant et généreux avec ses nombreuses familles d'habitués, servant de divines pizzas et une non moins divine pasta. Et le marché historique Sotto il Salone, ses stands de victuailles à se damner, où P. fut nourri, félicité, caressé par une multitude de grands-mamans attendries (à tel point que je n'osais ensuite le laisser seul devant un magasin de crainte qu'on me le vole). Il y eut l'accueillante librairie Pangea où l'on ne manque jamais de dénicher quelques pépites et qui distille toujours en sourdine de belles musiques ethniques.
Et les petits déjeuners chics au caffè storico Pedrocchi. Et, sous des bâches gorgées d'eau, la mauvaise humeur de vendeurs que la météo lunatique ne portait pas à faire des affaires. Et les verres de Campari, dans l'obscurité saturée de lumières (ainsi que l'étrange phénomène qui me permettait de m'orienter sans problème de l'appartement jusqu'à la terrasse bénie et m'empêchait de repérer plus tard le même chemin pour regagner mon lit).
Il y eut des chants, des chansons, des chorales, des sérénades dans la nuit. Il y eut des étudiants délivrés, des musiciens et des mendiants. Et il y eut aussi cet homme, au visage émacié, assis dans un coin, digne, trempé, qui a décliné sobrement notre offre d'un café.
Il y a eu des lévriers vêtus de manteaux Burberry double-face, des toutous qui tenaient dans un sac, des énormes clébards prêts à l'attaque que leurs maîtres devaient retenir fermement au collier (et qui ont laissé P. pensif : ces chiens n'étaient vraiment pas sa tasse de thé). Et finalement, il y a eu Zeus : trois mois et trente centimètres au garrot, craquant et farceur labrador marron.
Et puis peu à peu, la ville s'est vidée, a semblé désertée par ses nantis, abandonnée à ses vieux, à ses esseulés, à ses laissés-pour-compte. Peu à peu est arrivé le moment de charger l'auto, de saluer les coupoles et de retrouver au loin les Alpes. Sublimes, ensoleillées, enneigées, elles semblaient nous avoir attendus, comme des nuées de colombes dispersées, pour nous faire route à coups d'ailes vaporeuses, douces compagnes du chemin à rebours.
Coucou ma chère Dad. Ton billet se déguste comme un petit bonbon acidulé, ou alors comme une bonne grappa ou un verre de campari. Accompagné d'un morceau de Panettone, dans les bruits de la ville, les chants de Noël et l'effervescence tout italienne. Il y a les grands-mamans et les étudiants et tous les autres. Et puis aussi celles et ceux qui sont seuls durant ces fêtes et qui regardent passer les gens avec des victuailles plein les sacs à commission et les bras chargés de cadeaux. Notre humanité est si contrastée.
RépondreSupprimerJe serai bien venue avec toi, dans cette ville italienne là-bas, qui sent bon l'ailleurs si présent. Mais je suis restée sagement à guetter ton retour dans les Alpes enneigées. On t'a attendu sagement avec Pascal, avec un petit verre de Limoncello. Et te revoilà toute radieuse.
Je te souhaite un Noël comme tu l'aimes. Bises alpines enneigées.
Padoue, une des plus anciennes universités d'Europe.A 30 mn en train de Venise. Riche en culture historique, artistique et gastronomique. Une ville où l'on se sent bien. Mais qui comme toutes les villes connaît ses travers : centre de plus en plus huppé, expulsion progressive des gens modestes vers les périphéries, mendicité (et j'ai découvert cette fois-ci qu'il y a pire que le fait de mendier : le fait de ne pas pouvoir encore se résoudre à le faire. Tristesse de ça...) Je crois que tu aimerais y passer qques jours.
SupprimerD'après ce que je crois comprendre, tu adores le Limoncello ? le vrai ? Tiens, voici la recette originale, pour quand tu rentreras de tes crapahutages au Sud du Sud : https://ricette.giallozafferano.it/Limoncello.html
Passe de bonnes fêtes en famille (oublie les tensions, pour ne garder que les belles émotions). Reprends bien des forces avant de partir. Prépare judicieusement tes bagages. Et... glisse en douceur(s) vers l'année nouvelle! Belle aprèm!
Il va vraiment falloir que je m'arrête une fois à Padoue. ;-) Tu me fais envie avec ta librairie et ton café historique!
RépondreSupprimerPendant que j'écrivais, encore un arc-en-ciel : ils n'arrêtent pas. C'est le sixième. Un vrai bonheur!
SupprimerA te lire tu me donnes envie
RépondreSupprimerde faire un petit tour à Clermont Ferrand
la ville la plus proche
pour essayer de la voir avec ton regard
:-)
Que l'importance soit dans ton regard et non dans la chose regardée : facile à dire, un peu moins à appliquer. Certainement, les villes, comme les gens, mériteraient qu'on les regarde avec ouverture, curiosité et bienveillance. Ce qui n'est pas toujours possible, car il y a des villes qui sont plus faciles à admirer que d'autres (cf le livre "Le tour de France des villes incomprises" de Noyoux) et puis, indépendamment de la ville, il y a les conditions atmosphériques, et notre météo personnelle, qui ont une importance sur notre regard.
SupprimerJe n'ai pas voulu faire ici un joli billet. Quand l'homme au visage émacié a refusé mon offre de café, ça m'a lacéré le coeur. Surtout qu'il y avait des gens qui promenaient des sacs de grandes enseignes et que le contraste était saisissant.
Je ne connais pas Clermont-Ferrand, une ville qui a certainement ses attraits, où des gens vivent et rient et pleurent et où l'on mange et où l'on rit. La photographie a ceci de bien qu'elle nous aide à regarder, à regarder vraiment, sans enjoliver pour capter ce qui est. Avoir des yeux curieux, ça c'est le véritable défi.
Belle soirée à toi. Douce et apaisée.
Au sujet de ta photo :
RépondreSupprimerJ’aime ces paysages de rêves éveillés
où les montagnes semblent flotter dans le ciel
au milieux des nuages
Ce spectacle nous donne un cœur léger
et notre âme s’envole
vers plus Grand
http://parler-en-silence.eklablog.com/et-le-lumiere-vint-a133915628
Ah non non non. Ce n'est pas une photo hors réalité : pendant trois heures, en traversant la Lombardie, au retour, les Alpes étaient comme ça. Exactement. J'ai cherché ensuite dans ma "photothèque" ce qui ressemblait le plus à cette expérience. Les Alpes étaient magiques, tout simplement. On croit souvent que la magie a qqch d'extraordinaire : il n'en est rien. La magie appartient au quotidien.
SupprimerPasse du 24 au 25 en douceur. Et puis que ton 25 soit heureux. Et ainsi de suite, car Noël, dans le fond, est une journée magique comme une autre....
J'ai bien regardé ta série de 6 photos. C'est la 5ème qui me semble parfaite : la juxtaposition des deux réalités : terre à terre et céleste. Juxtaposées, mais pas opposées. Bravo!
Supprimer