Portrait d'une femme / Christophe Amberger / KHM / Vienne
Les années passent et S. continue à poser sur les gens un regard compatissant de dame patronnesse. En trois phrases, elle décrit les faiblesses et les difficultés de personnes dont la santé physique et morale ne paraît être aucunement en danger. Elle semble toujours encline à incliner vaguement la tête de côté quand elle pose ses questions, soucieuse des soucis qu'on voudra bien lui confier, fourbissant ses armes préférées : le diagnostic et la pitié. Il y a des gens ainsi : les problèmes des autres les intéressent (sans qu'ils n'aient jamais un geste pour les aider). Il y a des gens ainsi qui ont constamment besoin de se rassurer. Derrière toutes ces barrières, quelle détresse à masquer ? quelle confirmation à rechercher ?
Comme c'est bien dit, et cela m'a fait penser à quelques « S » de mon environnement humain.
RépondreSupprimerPar extension, me sont revenus en mémoire des souvenirs de jeunesse lorsque j'appartenais à un groupe de « jeunes handicapés » sous l'égide d'une association française, devenue un mastodonte social dépersonnalisé (mais ce sera une autre histoire). Des sorties le week-end étaient organisées. Franchement, c'était très sympathique et me faisait du bien. Nous étions notamment encadrés par des « jeunes de la Croix-Rouge », dont le dévouement et la gentillesse n'est absolument pas en cause. Mais dans ces personnes il y avait celles qui nous regardaient avec condescendance, aux bras tendus mais dégoulinant de miel poisseux, aux regards qui auraient pu aboutir à nous faire pleurer sur notre propre déchéance supposée.
Un jour, pour cette raison, je devais avoir dans les 16 ans, je me suis copieusement engueulé dans l'autobus avec l'une d'elles. Évidemment ça n'a pas donné un résultat positif… mais je ne regrette rien !
Je me suis demandé si ce n'est pas un sentiment de supériorité qui pousse les gens à la condescendance. Le système de compétition, la comparaison, la classification qui sévissent dans la vie sociale ont des effets abominables. Quand on n'a pas suffisamment d'assurance intérieure, on doit la trouver à l'extérieur. Si au moins les gens se sentaient supérieurs pour des qualités acquises de haute lutte (des savoirs, des performances), mais dans ce que tu racontes : savoir marcher sans béquilles, ça leur avait été donné. Bon : au moins ces personnes condescendantes faisaient qqch pour vous (en fait, elles le faisaient, je crois pour elles, sans pouvoir se l'avouer). Je te souhaite une toute belle soirée.
SupprimerIl n'est rien de pire que l'indifférence, la pitié, la condescendance, le faux intérêt niant l'autre dans ce qu'il est.Une négation de l'autre en quelque sorte.
RépondreSupprimerQu'a t-il manqué à ces personnes? Que craignent-ils pour se replier sur eux-mêmes ? Un manque d'amour et de confiance probablement les amenant à la peur de l'autre dans sa différence.
Oh merci pour cet éclairage : un manque d'amour ? ou de confiance en soi ? la peur de l'autre ? c'est possible. Dans tous les cas, l'autre jour quand elle a posé un "diagnostic" peiné sur une personne qui m'est chère (et qui vit paisiblement sa vie), je l'ai vue ainsi : incapable de traiter les autres en égaux. Sur le moment, j'ai failli la planter sur le trottoir où nous nous étions croisées. Puis j'ai pensé à simplement faire son portrait. L'esquisser et choisir un tableau pour l'illustrer m'a finalement aidée à prendre de la distance. Belle soirée, Ghislaine!
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